Bellum Dei, 2 : terrorisme et mondialisation, par Francis Moury (14/08/2019)

Photographie (détail) de Juan Asensio.
1689328337.jpgBellum Dei : Guerre sainte, martyre et terreur de Philippe Buc.







Note de lecture sur Jenny Raflik, Terrorisme et mondialisation - Approches historiques (éditions Gallimard, NRF-Bibliothèque des sciences humaines, 2016).

«Tout est à présent, comprends-tu ? Hier ne finira que demain et demain a commencé il y a dix mille ans.»
William Faulkner, L'Intrus (1948), traduction R.-N. Raimbault, éditions Gallimard, NRF 1952., cité par Monique Nathan, Faulkner par lui-même (éditions du Seuil, 1963, tirage de 1969) page 138.

Cette histoire moderne et contemporaine des relations internationales, examinée sous l'angle du terrorisme transnational, international et global (de l'Europe de 1820 environ aux débuts de l'État islamique à partir de 2014) est un complément historique et méthodologique naturel au livre de Philippe Buc sur les rapports entre guerre sainte, martyr et terreur en Occident (1) car, inévitablement, les événements du 11 septembre 2001 constituent le point névralgique historique autant que conceptuel de la démonstration de Jenny Raflik. Or ces événements appartiennent à un épisode relevant de la guerre sainte islamique telle que les stratèges d'Al-Quaida l'ont conçue (reprise serait plus exacte : voir par exemple l'insurrection dirigée par Mohammad al-Mahdi au Soudan aboutissant au siège puis à la prise militaire de Khartoum en 1885, ce qui provoque la chute du premier ministre anglais William E. Gladstone accusé de n'avoir pas assez vite secouru Charles Gordon qui défendait la capitale), guerre sainte dont le terrorisme est partie intégrante, opératoire, fonctionnelle puisqu'il vise à semer la terreur chez les ennemis de Dieu. Alors que Philippe Buc était le tenant d'une thèse continuiste maintenant l'identité du phénomènes de l'Ancien Testament à nos jours dans les religions hébraïque, catholique, musulmane et protestante, Jenny Raflik estime qu'on peut y introduire une sorte de coupure épistémologique (2) qu'elle situe vers le milieu du dix-neuvième siècle, période où débute la globalisation au sens économique et technologique. C'est à partir de cette époque que le terrorisme moderne naît, en jouant simultanément et consciemment sur plusieurs échelles spatiales, temporelles et médiatiques, sa forme retentissant du coup inévitablement sur son contenu.
Il n'y pas pourtant pas de rapport de finalité entre les diverses familles distinguées : le terrorisme des anarchistes révolutionnaires russes, balkaniques, français ou italiens de la fin du dix-neuvième siècle se donne d'autres buts que le terrorisme du Ku Klux Klan, lui-même n'ayant pas grand-chose en commun avec les Tigres Tamouls de Ceylan, le terrorisme nationaliste de l'Irgoun juive de 1944, sans oublier l'IRA irlandaise dont les origines historiques remontent au moins à 1815. Inversement le terrorisme d'état théorisé par Léon Trotski en 1920-1930 et mis en œuvre par les Soviétiques ou celui appliqué par les Romains de l'antiquité contre les révoltes juives elles-mêmes terroristes des Zélotes n'ont pas tant de points communs avec la guerre d'Al-Quaida.
Le terrorisme serait-il donc un flatus vocis, un être de raison ? Non puisque les États occidentaux modernes organisèrent dès 1898 une première Conférence internationale contre le terrorisme (anarchiste) et que le vingtième siècle fut rythmé par de telles conférences vouées à des terrorismes ethno-nationalistes, politiques, religieux. Jenny Raflik a eu accès aux rapports secrets déclassifiés de la NSA et de la CIA américaines, à ceux du ministère français de la défense, de l'OTAN (1949-1982) et d'autres institutions encore. Sa bibliographie rassemble dix-sept pages de sources internationales et françaises très variées, utilisées à bon escient. On apprend ainsi qu'il existe des bases internationales mi-étatiques mi-privées, établies et mises à jour par des universitaires afin de recenser systématiquement et statistiquement les divers types d'action terroriste : on les répartit par sexes de l'agent terroriste, par classes sociales, par niveau culturel, par la répartition géographique de son action, par son évolution chronologique, par le nombre de morts provoqués, ainsi de suite. Tout comme en économie politique, les sophistes ne se privent pas d'interpréter dans les sens les plus contradictoires ces données, prouvant ainsi qu'il n'y a pas d'expertise claire et scientifique du terrorisme : il demeure difficile à définir, à quantifier, à qualifier, in fine à combattre.
C'est le grand mérite de ce livre, publié dans une «Bibliothèque sciences humaines» qui archive la sociologie historique et politique de Raymond Aron, les études d'histoire des religions de Georges Dumézil, les études de sociologie religieuse et économiques de Max Weber, que de pousser l'enquête plus avant, sur le terrain de la philosophie de l'histoire.
La section (troisième partie, chapitre 8, pages 247 à 260) la plus naturellement excitante pour le philosophe est bien entendu celle relatant le fameux dialogue (2003 modifié 2004 pour son édition française) entre Jacques Derrida et Jürgen Habermas sur le concept du 11 septembre. Il est examiné à sa place chronologique dans l'histoire contemporaine des idées, après la thèse de Francis Fukuyama (3) post-guerre froide sur le triomphe universel envisageable de la démocratie à la suite de la chute du communisme soviétique et maoïste, après l'antithèse de Samuel Huntington (4). C'était d'abord un dialogue socratique et interrogatif : que s'est-il passé et comment caractériser précisément, essentiellement, la nature de l'événement ? Infirmait-il définitivement la thèse de Fukuyama ? Confirmait-il la thèse de Huntington ? Il ne répondait pas clairement à ces questions et il lui était donc impossible de devenir un «modèle» opératoire ou conceptuel utilisable par la philosophie de l'histoire. Sans surprise, ce dialogue s'est donc révélé sinon un flatus vocis du moins un quasi-impensé parce que quasi-impensable, faute de recul. Il impliquait (sans le dire franchement) simplement que Fukuyama s'était trompé et que Huntington avait raison mais le moindre historien ayant sérieusement étudié sa discipline pouvait déjà le prévoir : Jenny Raflik cite en ce sens Arnold Toynbee (5) dont le pessimisme intelligent ne pouvait que contredire d'avance l'optimisme assez niais de Fukuyama. Elle remarque d'ailleurs bien que la thèse de Huntington peut donner satisfaction aussi bien au camp occidental qu'au camp terroriste d'Al-Quaida, signe de son inquiétante pertinence.
Les statistiques, l'histoire moderne et contemporaine, l'histoire des idées, la sociologie, l'économie sont convoquées et même la psychiatrie et la psychologie le sont aussi puisque, inévitablement, certains commentateurs ont très sérieusement posé la question de savoir si les terroristes étaient fous ou bien si leurs familles pouvaient présenter des signes statistiques de cas de démence meurtrière. Inutile de préciser que ces enquêtes n'aboutissent pas : un certain nombre de terroristes ont vécu une enfance heureuse dans des familles soudées et riches voire richissimes. De tout cela, on ne tire que des formes structurelles vides, pouvant être mises à disposition d'interprétations opposées et tout aussi vaines.
Il faudrait donc peut-être pousser un cran plus loin l'analyse du phénomène en utilisant la psychologie des profondeurs, la philosophie des religions et la philosophie de l'histoire mais d'une histoire envisagée cette fois des origines primitives à nos jours. Sortons donc un instant du cadre de l'histoire des relations internationales ou bien enrichissons-les de quelques points de vue intéressants.
Du côté de la psychologie des profondeurs, Francis Pasche s'était intéressé à la question. Il avait publié en 1990 un article (6) dans lequel il définissait, à propos de la question de savoir si la psychanalyse pouvait être assimilée à une idéologie, cette dernière comme la source du terrorisme. Il était revenu sur la question au début de Idéal et idéalité (7) en 1995, repris dans la seconde partie de son recueil posthume Le Passé recomposé. Voici la définition qu'il en donne (page 50) :
«Je ne crois pas que, dans les sociétés scientifiques, ni dans les médias, le terme idéologie soit souvent utilisé au sens que son inventeur Destutt de Tracy lui a donné, à moins de le spécifier. L'on entend par là habituellement de nos jours une croyance collective en un système exclusif de pensée et de règles d'action impératif, car à ce système il est conféré une valeur absolue. Cela entraîne chez tous ceux qui partagent cette croyance l'ambition de convertir par tous les moyens, fût-ce par les plus violents, le reste des êtres humains qui ne la partagent pas, ou tout au moins de leur imposer l'observance de ses lois par la conquête et la contrainte jusqu'à l'élimination physique et la purification ethnique. Il en est ainsi du marxisme-léninisme, du nazisme, des divers intégrismes religieux et des nationalismes exacerbés. »
L'idéologie ainsi conçue serait, sur le plan purement psychanalytique, «l'aboutissement d'un processus beaucoup plus global que dans le cas de l'Idéal du moi et de l'idéalisation. C'est une régression massive en deçà de la survenue du Surmoi paternel» (page 54). Sur la distinction afférente, théorique et clinique, entre Idéal du moi, idéalisation et idéologie d'une part, Surmoi d'autre part, le lecteur pourra lire avec profit l'article Du Surmoi ambivalent au Surmoi impersonnel (écrit en 1995 mais situé après l'article de 1993 dans le même recueil posthume organisé par Didier Anzieu) qui s'ouvre sous les auspices de la théologie négative du Pseudo-Denys l'Aréopagite et de la section psychologique de la métaphysique de René Descartes, à savoir Les Passions de l'âme.
Du côté de la philosophie des religions et de l'histoire des religions, il faut savoir que les thèses de Philippe Buc et certains aspects de l'analyse de Jenny Raflik trouvent un soubassement naturel chez celles de penseurs tels que Rudolf Otto, Mircea Eliade ou Roger Caillois. Le sacré inspire l'amour et la terreur simultanément : il est tremendum et fascinans. C'est de cette fascinante dualité qu'il faudrait partir pour étudier la question de l'origine religieuse du terrorisme d'une part, du rapport de l'histoire religieuse à la terreur d'autre part, non seulement dans les religions monothéistes révélées modernes (G.W.F. Hegel, Max Weber, James Frazer, Sigmund Freud, Karl Kérényi, Georges Bataille) mais encore dans les religions primitives indo-européennes et antiques (Franz Cumont, Georges Dumézil, Mircea Eliade, James Frazer, Sigmund Freud, Jean-Pierre Vernant), asiatiques (Mircea Eliade, Marcel Granet, Max Weber), africaines, américaines et australiennes (Georges Bataille, Mircea Eliade, Lucien Lévy-Bruhl, Marcel Mauss, Alfred Métraux, Géza Roheim).
La philosophie de l'histoire aurait enfin son mot à dire car elle utilise souvent des fragments de philosophie de la religion pour établir ses constructions théoriques. Sans la Vie de Jésus de G.W.F. Hegel et son exégèse du rachat sacrificiel, il n'y a plus de philosophie hégélienne de l'histoire qui tienne : Jean Wahl l'avait bien établi en son temps (8) et Bernard Bourgeois et Claude Bruaire l'ont depuis amplement confirmé. Sans philosophie de la religion, sans philosophie de l'histoire de la religion, il n'y a plus non plus de système du savoir encyclopédique hégélien qui tienne, ainsi que l'a très bien montré François Chatelet. (9) Que les religions se combattent et se succèdent temporellement dans un même espace, que la hiérophanie puisse être terrifiante, que les instruments de la gloire de Dieu puissent être la terreur qu'il inspire : ces éléments ont, dans la philosophie de G.W.F. Hegel, un sens dialectique. D'une certaine manière, mais dans un registre purement catholique dérivé de la théologie politique des pères grecs et latins (notamment saint Augustin et Origène), le thème inspire aussi son contemporain Joseph de Maistre (10). Il y aurait en outre des éléments à étudier dans ce sens à partir des études classiques sur les rapports du Destin et des êtres humains dans l'Histoire romaine de Tite-Live, dans la Pharsale de Lucain, dans les Vies parallèles de Plutarque : voir à ces sujets les études respectives de Raymond Bloch, de René Pichon, de Bernard Latzarus (11). Le thème en question se prolonge jusqu'à William Shakespeare au moins : le cauchemar fantastique de Calpurnia, la veille de la mort de César, provient en droite ligne des historiens grecs et romains des deux premiers siècles après JC. Les prodiges, les monstres, les cauchemars sont un avertissement des Dieux dans l'antiquité classique : ils terrifient les hommes parce qu'ils sont interprétés comme étant des messages divins, outre leur charge symbolique et plastique.
S'y ajoute le thème du sacrifice humain, transversal à l'histoire violente des religions primitives comme modernes, étudié par les divers historiens et philosophes des religions cités plus haut. Les étrangleurs voués à la déesse Kali sont mentionnés brièvement par Jenny Raflik mais il me semble qu'ils eussent mérités une étude à part entière. Ils lui rendaient depuis (au moins) le treizième siècle jusqu'au dix-neuvième siècle un culte primitif en étranglant les voyageurs indiens ou étrangers qui traversaient l'Inde : des dizaines voire des centaines de milliers (certaines sources évoquent des millions) de morts leur furent attribués par les administrateurs anglais victoriens qui furent contraints de créer une unité de police spéciale pour tenter d'en venir à bout (12). Ce phénomène pose d'intéressantes questions d'histoire des religions en raison de l'ampleur de sa répartition géographique, et de son aspect transversal puisqu'il recoupait des territoires hindouistes et musulmans – dont la distinction aboutit en 1947 à la partition politique de l'Inde et du Pakistan – d'une manière que les Anglais documentèrent aussi précisément qu'ils le purent durant leur colonisation de ces territoires au dix-neuvième siècle.
Sur le plan matériel, le livre de Jenny Raflik est pratiquement impeccable : je n'ai relevé qu'une seule coquille à la note 1 de la dernière ligne de la page 364 où il faut lire non pas le fautif «figure 31» mais le correct : figure 28, puisqu'elle renvoie à la dernière et vingt-huitième figure (un «schéma d'interprétation de l'évolution du terrorisme international» illustrant le livre. L'annexe rassemble commodément les sources internationales administratives, internet (bases de données) et bibliographiques, ainsi qu'une liste des sigles des organisations terroristes et un index des groupes terroristes.
Une seule lacune relevée, à la rubrique «Irgoun», page 401 : il faudrait rajouter en référence la note 1 de la page 124 qui répertorie les lieux et dénombre les victimes arabes et britanniques des attentats à la bombe et à la voiture piégée commis en Palestine par cette organisation juive entre février 1944 et février 1948.

Notes
1) Philippe Buc, Guerre sainte, martyre et terreur – Les formes chrétiennes de la violence en Occident (Éditions Gallimard, 2017). Voir note indiquée plus haut.
2) Ce terme s'entend au sens que lui avait donné Gaston Bachelard, La Formation de l'esprit scientifique (Éditions Vrin, 1938). En histoire de la philosophie des sciences, Bachelard était discontinuiste : il assurait qu'il s'était produit au dix-septième siècle une révolution dans la pensée scientifique, instaurant un rationalisme inédit. Son collègue à la Sorbonne, Léon Brunschvicg, Les Âges de l'intelligence (Éditions PUF, 1934) défendait la même position. Tous deux s'opposaient à la célèbre thèse continuiste émise en 1908 par Émile Meyerson, le correspondant d'Einstein dont les disciples immédiats furent Alexandre Koyré et Louis de Broglie.
3) Francis Fukuyama, La Fin de l'histoire et le dernier homme (Éditions Flammarion, 1992). La première partie du titre est empruntée à la philosophie de G.W.F. Hegel et la seconde partie provient de Friedrich Nietzsche, ainsi que ne manque pas de le préciser Jenny Raflik.
4) Samuel Huntington, Le Choc des civilisations (Éditions Odile Jacob, 1997). Jenny Raflik remarque page 253 que le titre du livre de Huntington n'est plus suivi d'un point d'interrogation alors que celui de l'article original, paru en 1993, en comportait un.
5) Arnold J. Toynbee, A Study of History (Oxford University Press, 1934-1961). Pour une approche francophone, non citée par Jenny Raflik mais plus commode d'accès, cf. A.J. Toynbee, Guerre et civilisation, extraits par Albert-V. Fowler, traduction Albert Colnat (Éditions Gallimard, 1953 puis retirage in collection Idées-Gallimard, 1962). Du même Toynbee, Le Christianisme et les autres religions du monde (Éditions universitaires, 1959) traite d'une partie des questions soulevées par Philippe Buc d'une part, par Jenny Raflik d'autre part.
6) Francis Pasche, La Psychanalyse est-elle une idéologie ? in Revue Française de Psychanalyse n°54 (Éditions PUF, 1990).
7) Francis Pasche, Le Passé recomposéPensées, mythes, praxis, préfacé par Didier Anzieu (Éditions PUF, 1999), page 51.
8) Jean Wahl, Le Malheur de la conscience dans la philosophie de Hegel, (Éditions PUF, collection BPC, 1929 + revue 1951).
9) Francis Moury, La Vie et la mort du système de G.W.F. Hegel (2009), archivé ici : https://www.juanasensio.com/archive/2009/02/11/la-vie-et-la-mort-du-systeme-de-g-w-f-hegel-par-francis-moury.html.
10) Jacques Ploncard d'Assac, Enquête sur le nationalisme : Joseph de Maistre, (Éditions Société de philosophie politique, Lisbonne 1969) demeure une estimable introduction d'ensemble à sa vie et son oeuvre + Juan Asensio, Notes de lecture sur les Considérations sur la France de Joseph de Maistre, archivée ici. Juan Asensio y résume clairement l'aspect théocratique de la philosophie de l'histoire de Joseph de Maistre : «C'est la violence même de l'événement révolutionnaire qui en signe l'appartenance à un ordre supérieur, invisible, qu'il convient de pouvoir discerner, comme seul peut le faire un voyant».
11) Raymond Bloch, Les Prodiges dans l'Antiquité classique (Éditions PUF, coll. Mythe et religions, 1963) + René Pichon, Les Sources de Lucain (Éditions Ernest Leroux, 1912) + Bernard Latzarus, Les Idées religieuses de Plutarque (Éditions Ernest Leroux, 1920).
12) Cf. la note historique finale inscrite à l'écran, à la fin du remarquable mais aujourd'hui un peu trop méconnu Les Étrangleurs de Bombay (The Stranglers of Bombay - Angleterre, Hammer films 1959) de Terence Fisher, directement inspiré par la vie et les écrits de l'officier anglais William Henry Sleeman (1788-1856).

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