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« Renaud Camus commentateur de Paul Celan : cachez-moi ce si kitsch Auschwitz | Page d'accueil | Renaud Camus dans la Zone »

14/11/2012

Renaud Camus, dangereux et loufoque

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Photographie (détail) de Juan Asensio.

«Il n'y a rien de plus sot qu'un journal, tout ce qu'on écrit de sincère est niais.»
Georges Bernanos, Les Enfants humiliés.

«Statistiques et sociologie sont au parti dévot ce que la biologie de Lyssenko était au stalinisme.»
Renaud Camus, La France est en guerre et personne ne veut le dire.


IMG_1596.JPGRenaud Camus, assez intéressant lorsqu'il analyse les maux dont souffre le langage (c'est cet aspect qui, lorsque je découvris son œuvre, m'intéressa le plus), sans toutefois apporter beaucoup de vues nouvelles si nous le comparons à un Kraus, un Robin ou un Orwell, est insupportable, fat et ridicule comme une vieille fille monomaniaque lorsqu'il braque son regard d'aigle royal sur l'orifice qui lui est le plus familier, je veux bien sûr parler de son propre nombril.
Certains commentateurs affirment qu'un lecteur comme moi (ils doivent bien me connaître, je suppose) aurait trahi Renaud Camus, commençant par admirer ses œuvres (certaines d'entre elles tout du moins) puis le vouant aux gémonies. Je n'admire aucun auteur vivant, sauf, peut-être, Guy Dupré et Cormac McCarthy.
J'ai découvert Renaud Camus assez tardivement, tout comme Dantec ou Houellebecq en fin de compte, et ce sont ses réflexions sur le langage et elles seules que j'ai trouvé pertinentes. La lâcheté, la méchanceté, la langue vipérine de vieille fille confite dans ses linges (tout cela, bien évidemment, présent dans ses innombrables volumes de journal, du moins pour qui sait lire. Rappelons ainsi le long épisode où Camus battait comme plâtre l'un de ses chiens), bref, la petitesse de Renaud Camus et celle de ses lecteurs me sont apparues, magnifiquement dévoilées, à l'occasion de la querelle des Infréquentables.
D'autres commentateurs (je fais référence aux courageux anonymes qui me conspuent sur la Toile, comme sur le blog François Desouche) s'étonnent que j'aie osé, le mot n'est pas trop fort, évoquer Auschwitz devant Renaud Camus. Ils oublient deux choses : je rédigeai tout d'abord ma précédente note, justement consacrée à Renaud Camus lecteur de Paul Celan, alors même que j'allais être invité sur le plateau de l'émission de Taddeï.
Ensuite, faut-il rappeler que dès 2001, soit avant même d'avoir l'immense privilège de lire ma toute première ligne de Renaud Camus, je fis paraître un ouvrage consacré à George Steiner qui évoque longuement la thèse de cet auteur selon laquelle l'origine d'Auschwitz doit être recherchée dans la très longue tradition de l'antisémitisme chrétien ?
Je pourrais évoquer une troisième raison pour expliquer mon dégoût (là aussi le mot n'est pas trop fort) non seulement à l'endroit des idées politiques de Renaud Camus, mais à ceux de son écriture, de plus en plus insignifiante, et de l'homme : je ne supporte plus, je n'ai à vrai dire jamais supporté la vanité, la prétention, l'onanisme satisfait et publicitaire (exposé à longueur de ligne, sur plusieurs sites), par lesquels Camus, comme d'autres (Matzneff) évoque l'unique statue à laquelle il rend un culte : lui-même.
Je le dis et je le répète : mon travail de lecteur est celui d'un serviteur alors que Renaud Camus, sous couvert de servir une cause qui le dépasse, ne fait montre de rien de plus que d'une prétention insoutenable. La seule cause de Renaud Camus est donc le soi-mêmisme, pas la France, la beauté de ses paysages, la beauté de notre langue massacrée, une certaine conception de la littérature dans laquelle je ne me reconnais pas, étant en fin de compte infiniment moins obsédé par la modernité expérimentale que ne l'est Renaud Camus (voir par exemple ses Églogues).
Que de phrases, ainsi, aussi creuses que banales lorsque le petit aéronef de notre intrépide explorateur tournoie sans fin dans le disque d'accrétion du trou noir minuscule, que de subtilités bathmologiques de jésuite centenaire, que de pages et de pages, de livres et de livres, que de photographies et de photographies, d'autoportraits à la mine tantôt réjouie, affable, royale, russophile, constipée, libérée, champêtre, inutile, indienne, picturale, roulée, afflelouesque, vague, lumineuse, claire-obscure, couverte, que de commentaires, et encore de commentaires, sur ses sites auxquels il accorde une importance maladive, pour nous décrire, par le menu, la plus ennuyeuse de ses journées passée au coin de sa cheminée seigneuriale qui a la taille de ma cuisine, sa délicieuse promenade de châtelain en son domaine gersois, la moindre de ses lectures, y compris celle d'un livre de votre serviteur (1), le moindre de ses faits et gestes, la plus inintéressante notation du temps qui passe, d'un courriel reçu, d'une facture de plomberie à régler, d'une visite chez l'urologue (parfois, Renaud Camus semble même confondre ces deux professionnels de la tuyauterie), que de matznévisme racoleur et imbécile, c'est même à se demander si l'écrivain ne dispose pas d'un clone docile qui n'oublierait pas de vivre à sa place le plus insignifiant de ses problèmes gastriques, intestinaux, duodénaux, prostatiques, oculaires, auriculaires, achriens, acariens, etc. !
Mon Dieu, même le soi-mêmiste priapistique Gabriel Matzneff nous paraît être un monstre d'altruisme et même de contention verbale au regard de notre Sur-Narcisse camusien.
Tour à tour intéressant et pitoyable lorsqu'il se cantonne, ce qui devrait largement suffire à sa vie d'oisif et de précieuse ridicule osant parler pour les humiliés et les offensés, à son rôle d'écrivain prolixe mais néanmoins passable, Renaud Camus, pour qui l'a bien lu, devient pathétiquement prévisible lorsqu'il se mêle de politique ou plutôt, comme Jean Raspail, de politique fictionnelle.
Quelles sont les compétences de Renaud Camus pour affirmer que la France et même l'Europe vivent la seule crise qui vaille à ses yeux, dont les effets sont parfaitement mesurables chaque heure, celle du Grand Remplacement de sa population souchienne (disent les petits chanteurs à la croix de fer qui le soutiennent) par des hordes de dangereux fanatiques, criminels, violeurs de bébés, barbares trancheurs de têtes par trop chrétiennes ? Est-il un historien ? Non. Est-il un sociologue ? Non. Est-il un statisticien ? Non. Est-il un spécialiste des flux migratoires ? Pas davantage. Est-il un milletiste, un de ces anciens combattants prétendus des phalanges chrétiennes libanaises dont les sphincters se relâchent pourtant brusquement lorsqu'un Noir ou un Arabe les regarde plus d'un millième de seconde ? Peut-être. Ce qui lui permettra, à tout le moins, de se décrire comme un penseur persécuté, victime de l'intelligentsia parisienne gauchiste et de la juiverie internationale.
En ayant naguère apporté son soutien au parti de Marine Le Pen, d'une façon qui ne souffre guère la discussion amphibologique dont il s'est fait le zélé défenseur (cf. le communiqué n°1360, en date du mercredi 21 mars 2012), Renaud Camus, contrairement à ce qu'affirme Pierre Assouline dans une note du 29 mars tout bonnement journalistique, donc réductible à un slogan, ne tombe absolument pas le masque, et il faut être, décidément, un fort mauvais lecteur en plus d'être un cacographe émérite comme l'est Assouline, pour sembler ignorer que les professions de foi artistiques modernistes voire ultra-modernistes exprimées par un auteur ne sont jamais inconciliables avec des opinions non pas réactionnaires, conservatrices ou même extrémistes mais tout simplement xénophobes et ridicules, et d'autant plus ridicules que nous avons quelque peine à imaginer le pauvre et frêle, le si délicat et éthéré Renaud Camus se retrouvant, à Dieu ne plaise, au milieu d'une fin de cortège composée de quelques frontistes mono-neuronaux fort surpris ma foi d'approcher de si près un exemple vivant d'écrivain homosexuel rallié (à quelques détails près, soyons aussi précis que le très précis Renaud Camus) à leurs occupations limpides comme les yeux d'un vigoureux éphèbe aryen : hors de nos belles campagnes de France, tous ces... panneaux publicitaires qui défigurent nos prés et champs où il fait si bon ratonn... euh, pardonnez-moi, admirer les limpides paysages d'un sol chargé d'une histoire si glorieuse que le moindre manchot d'Antarctique est pressé, sitôt né, de traverser les océans pour venir s'en oindre les plumes.
Car enfin, elles sont anciennes pour le moins, les analyses de Renaud Camus sur ce qu'il appelle le Grand Remplacement des blonds Gaulois par les Maures brunis par le soleil, y compris celui qui dispense ses bienfaits au-dessus des aimables barres d'immeubles des banlieues et sa clientèle de lecteurs, si je me souviens de ce que je vis lors d'une soirée conjointement organisée par Camus et l'un de ses amis peintres surnommés Flatters (Jean-Paul Marcheschi), n'est pas exactement composée d'in-nocents apôtres de la société bigarrée et riche de ses différences, comme disent, encore une fois hélas, d'autres slogans.
Je n'ai vu là-bas, durant cette soirée pour happy few auquel notre monarque solipsiste, dénué de la plus petite once de charité mais jouant la cordialité, me convia en me demandant, la bouche remplie de trémolos incitatifs, d'y venir avec ma mauvaise humeur (sic), qu'une théorie de vieilles hommasses aux faces de sorcières goyesques saponifiées devant lesquelles notre hôte faisait le baise-main et la semi-génuflexion empressée, quelques éphèbes au regard mouillé, nonchalamment portés par leurs femelles efflanquées comme de petits sacs brillants tout remplis de babioles, se sabrant le poil de torse au Laguiole plaqué or, d'autres, tout aussi efféminés mais jouant au Genet des venelles, cultivant au contraire la toison et la moustache amoureuse des culs qui s'essuient dans du papier de soie, rêvant à coup sûr de l'Arabe idéal, celui qui s'offre dans un lit d'Orient de Pierre Loti (2) et pas la petite frappe de quartier dont ils n'oseraient fixer l'ombre, de vagues et dolentes demi-mondaines à tendance mystico-universitaire, une attachée de presse anorexique gueulant sur tous les toits que Petit Chou aimait la prendre comme un petit garçon (sic) et quelques gandins jamais avares d'une perfidie lâchée dans un creux délicat d'oreille, la vraie France quoi !
Renaud Camus a même déposé sur ses tartines de pain aux figues son AOC in-nocente, garantie sans mot vulgaire et d'ADN gaulois, celle des humiliés et des offensés modernes, tous blancs, catholiques, fidèles à leurs épouses et grands reproducteurs devant l'Éternel que notre Charles Martel des temps modernes prétend défendre et, retenez-le il vous le demande ses petits poings tout blancs de colère contenue, laver à grande eau de sa pollution maghrébine, musulmane, juive en plus d'être sioniste.
Pauvre Villon. Pauvre Rimbaud. Pauvre Bloy. Pauvre Péguy et pauvre Bernanos, des écrivains si près des plus humbles, pauvre inconnu dont toute cette fausse science d'un Verbe pour prélat décadent conchie la simplicité enfantine. Ce sont ces voix qui nous manquent, alors que celle de Renaud Camus, paraît-il raillée, empêchée, tue même, se répand comme un jus de charogne distillant sa plus secrète pourriture, ce sont ces voix qui, seules, ne nous font pas honte, celles qui peuvent se lever, celles qui se sont levées et semblent à présent définitivement éteintes, celles qui n'ont pas eu peur, quitte à nous engueuler un peu vulgairement, au nom d'une France silencieuse sinon muette, maintenant exposée comme une putain contrainte de faire la retape, sans que nous ayons l'envie irrésistible de leur cracher au visage ni même que nous osions penser qu'elles se mêlent, franchement, de ce qui ne les regardait pas.
Honte à Renaud Camus, cet auteur qui finalement ne plaît qu'aux lâches et aux faux valeureux, aux barbons, à celles et ceux qui planquent leur trouille, leur haine, leur racisme, derrière des missels composés sur des points virgules et les vapeurs de petits raouts où cliquètent les références pour agrégés de grammaire pré-celtique.
Honte à ses lecteurs plus ou moins compétents et qui, pour les plus courageux d'entre eux, affirment qu'ils ne cautionnent pas toutes les thèses de l'Anti-Remplaciste absolu, se contentant de nous dévoiler les beautés secrètes de la virgule camusienne dans le 38e tome des Églogues.
Du reste, il suffit de lire les commentaires racistes, antisémites et orduriers, par exemple sur le blog François Desouche (3) qui saluent la plus récente présentation télévisuelle des idées politiques infectes et, je le répète, loufoques et dangereuses, de Renaud Camus, pour savoir que, désormais, se cache derrière la si appréciable politesse de cet homme, pourtant si visiblement mal à l'aise alors que je me trouvais à ses côtés, tout contre lui même (pénétrant sur le plateau, j'avoue avoir ri silencieusement de cette blague où je n'ai pris aucune part), la frange la plus extrémiste de la population française, à peine teintée de quelques références respectables et d'une bonne orthographe sur le forum public de l'In-nocence.
Mais, comme notre pauvre homme, qu'un Laurent Dandrieu, la fleur au fusil devant l'Ennemi innombrable et qu'on a eu paraît-il toutes les peines du monde à empêcher d'enfiler une tenue bleu horizon pour monter au Front, a apparemment oublié de jeter dans le dernier carré des résistants français composé d'Élisabeth Lévy, Denis Tillinac, Claude Hagège, Paul-François Paoli et André Bercoff (cf. le dossier de Valeurs actuelles du 12 avril), semble accablé par les propos justes, ineptes, inexacts ou fielleux que son ralliement non pas attendu mais logique dans sa pente de lâcheté a provoqués sur la Toile, je m'en voudrais de contrarier sa si délicate digestion de dernier Prince en sa tour écroulée par mon acrimonie, que les tartuffes auront beau jeu d'expliquer par mes monotones occupations judiciaires, et me contenterai donc de citer le Maître de Plieux (cousin germain du martial Richard Millet sur cette question de l'orientation politique à fort tropisme extrémiste), en lui renvoyant à la face les mots qu'il me consacra dans Une chance pour le temps, (Journal 2007, pp. 104-108) où il joua l'indigné devant ma violence verbale insoutenable, en déclarant ainsi que son ralliement aux thèses (à l'exception de quelques-unes, soyons très précis) du Front National relève d'un style de vie, d'un style d'être, d'un type humain — dont on ne saurait trop se garder sa vie entière. De la mienne en tout cas exit Renaud Camus, écrivain passable, homosexuel déclaré amateur de pilosités effrénées devenu le héraut de catholiques attachés à la perpétuation prolifique de leurs troupes, penseur xénophobe, probable antisémite si nous en jugeons par l'affaire dite Renaud Camus, chantre de la lutte (pour le moment orale) contre l'islamisation de nos sociétés, sans regret de ma part (et d'autant moins qu'il n'y tenait guère de place), voire absolument aucune, ajouterais-je.

Notes
(1) À la date du 10 juillet 2005. Notons que le souci moderniste de Renaud Camus est superbement illustré par de magnifiques sites nous offrant une ergonomie luxueuse.
(2) Je ne sais si une étude existe liant l'homosexualité de certains grands penseurs comme Louis Massignon ou des écrivains tels que Jean Genet à leur découverte de l'Orient, du moins d'un Orient plus ou moins fantasmé. Ce lien est évoqué par Anthony Burgess, l'auteur du fameux Orange mécanique et de son Testament ici critiqué, dans ses Puissances des ténèbres ou encore dans son Hommage à Qwertyuiop.
Cette étude, appliquée à Renaud Camus qui, en grand voyageur qu'il a été et continue d'être, a aimé bien au-delà des frontières du Gers, offrirait sans doute d'éclairantes perspectives sur sa haine de l'Arabe de banlieue française (pardonnez-moi ce schématisme), et son amour, pardon, commençons par son désir, pour sa probable contrepartie phantasmée et massignonienne, le bel Arabe relégué le plus loin possible toutefois de Plieux.
Quoi qu'il en soit, comme un ami me l'a fait remarquer, Renaud Camus pourrait être rapproché de la figure complexe du commandant Vincent Monteil, chef de cabinet militaire démissionnaire de Jacques Soustelle, collaborateur du colonel Buis à Rocher-Noir durant la phase finale de la guerre d'Algérie, officier orientaliste disciple de Louis Massignon, auteur de nombreuses études sur l'Iran, l'Indonésie, le Maroc, T. E. Lawrence, etc., gaulliste, homme de gauche, homosexuel, converti à l'Islam sous le nom de Mansour, anti-sioniste et pour terminer négationniste.
(3) Pour lire, à ce jour, les 410 commentaires saluant nos prestations respectives, il faut posséder un identifiant et un mot de passe. J'ai constitué un fichier de 120 pages, disponible pour qui le souhaite, des propos aberrants, orduriers, antisémites, racistes, des lecteurs de Renaud Camus.
Attendons un improbable communiqué du Parti de l'In-nocence condamnant fermement ce déferlement de haine crasse, lui qui écrivait, dans son communiqué n° 1466 du samedi 20 octobre 2012 intitulé Sur des publications antisémites sur Twitter : «Le parti de l'In-nocence est très sensible à l'exigence de tenue, formelle et morale, dans tous les aspects de la vie quotidienne dont relèvent éminemment, pour le meilleur et pour le pire, les dits «réseaux sociaux». La déculturation de l'espèce est aussi sensible que son réensauvagement, dans cet épisode lamentable, tant la plupart des «tweets» révélaient d’hébétude, plus encore, s'il se peut, que de détestation. Il est à noter au passage que l’anonymat de la grande majorité des interventions, par la lâcheté qu’il témoigne, favorise le relâchement de l’expression autant et plus que celui de la conscience.»