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26/01/2005
Chris Foss ou l'éveil insoupçonnable
Bien des années avant que je ne découvre les œuvres d’un Goya, d’un Rembrandt ou d’un Dürer, je suis resté dans ma chambre, durant de longues journées d’une réclusion délicieuse, rêveuse, à feuilleter un album que m’avait offert l’un de mes cousins genevois, graphiste de métier et qui n’ignorait pas mon goût prononcé pour la science-fiction.

Je me demande parfois ce qui a tant pu m’attirer dans les dessins certes impeccables de l’illustrateur britannique, qui avait travaillé pour les projets de Dune (l’adaptation qu’en rêvait de réaliser Jodorowsky), d’Alien (son vaisseau, le Nostromo, reste toujours impressionnant de puissance) ou de Superman (avec les superbes décors de la planète Krypton) avant qu’ils ne soient tous abandonnés au profit de maigres œuvres d’imagination. A l’inverse d’un piètre Siudmak ou même d’un Gyger parfois surestimé, Foss ne se mêle pas de métaphysique, ne délivre presque jamais le moindre «message» : il dessine et c’est bien assez.

Ainsi, à mille lieues des impératifs techniques rigoureux auxquels doivent bien se plier les techniciens de la Nasa ou de l’ESA s’ils veulent que leurs sondes d’une laideur caractéristique puissent tout de même survivre au vide de l’espace, c’est la parfaite inutilité des machines inventées par Foss qui confère à ces dernières une étrange lueur ou même, je n’ai pas peur de l’écrire, une espèce d’aura que je ne retrouve plus, et encore, bien rarement, que lorsque, rêvant, je m’imagine arpentant le tarmac d’un spatioport écrasé de lumière aux côtés d’une Rydra Wong, l’héroïne de Babel 17.

Tous les commencements de quelque sincérité, n’est-ce pas, sont non seulement minuscules mais aussi insoupçonnables.
Lien permanent | Tags : littérature, science-fiction, chris foss | |
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