« Georges Molinié, prince des cacographes | Page d'accueil | Harcèlement littéraire de Richard Millet ou le manquement aux lettres »
07/09/2007
All sparks will burn out... in the end
«Mais ce qu’ils savaient nous l’ignorons, et tous nos désirs, tous nos efforts ne peuvent l’atteindre jusqu’au sens de l’apôtre, d’autant plus que le verset suivant augmente l’obscurité. Car que signifie : «Déjà le mystère d’iniquité s’accomplit. Seulement qui tient, tienne toujours, jusqu’à ce qu’il se retire; et alors l’impie se découvrira». Ici, je l’avoue, le sens m’échappe entièrement. Toutefois, je ne tairai point certaines conjectures que j’ai pu recueillir par lecture ou par entretien», Saint Augustin, La cité de Dieu (Seuil, coll. Points Sagesse, 1994, t. III), Livre 20, XIX, pp. 188-9.
«Peut-être le temps des choses absolument dicibles, dont nous éprouvons aujourd'hui la fureur, que le temps où toutes les figures de l'Indicible et tous les masques de l'onto-théologie ont été liquidés, c'est-à-dire dissous et payés en des mots qui montrent désormais simplement le néant sur lequel ils se fondent; le temps où toute l'expérience humaine du langage a été ramenée à l'ultime réalité négative d'un vouloir qui ne veut rien dire, peut-être ce temps est-il aussi celui où peut redevenir visible la demeure in-fantile (in-fantile, c'est-à-dire sans volonté ni voix, et pourtant, éthique, habituelle) de l'homme dans le langage», Giorgio Agamben, Le langage et la mort (Christian Bourgois, coll. Détroits, 1997), huitième journée, p. 162.
Je rentrais d'une soirée durant laquelle j'avais bu de façon inconsidérée, échangé quelques vues anodines avec des hommes, quelques regards et sourires réglés avec des femmes, toutes amies de F., la maîtresse des lieux que je n'avais pas revue depuis mes années d'études à Lyon.
Par miracle, je trouvai au retour un taxi après quelques minutes seulement de marche dans le froid mordant du petit matin.
Par un miracle encore plus grand ou ridicule, le chauffeur du taxi ne m'adressa pas un seul mot durant près d'un quart d'heure, un vieux titre des Editors égrenant son refrain facile mais pas moins suggestif.
Confortablement installé, traversant Paris encore endormi d'est en ouest, je songeai à la beauté de cette ville la nuit (encore une image résolument gâchée par un imbécile).
Mes mains sentaient le parfum que portait F. et l'une et l'autre, la ville et la jeune femme extraordinairement réelles, retourneraient pourtant à la poussière d'où une impérieuse volonté les avait tirées.
Il suffisait d'attendre, un seul jour ou mille années, c'était bien exactement la même chose, à ce moment-là, dans mon esprit.
Et nous sommes heureux, monstrueusement heureux d’être dehors, seuls, intacts et violents, le ventre presque vide.
Et j'étais heureux, monstrueusement heureux d'être dans une voiture dont la vitesse étirait les arcs de lumière, seul, intact et violent, le ventre brûlant les alcools troubles d'une nuit sans lendemain.
Lien permanent | Tags : littérature, raymond abellio, giorgio agamben, berserker | | Imprimer