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16/03/2007

Au «flambeau de l’analogie». L’œuvre de Maistre éclairant notre époque, par Olivier Bruley (Infréquentables, 4)

Crédits photographiques : Michael Regan (Getty Images).

Il n’est guère étonnant que les Français, pour qui la Révolution a quelque chose de sacré, regardent comme peu fréquentable un auteur qui la déclare «œuvre diabolique» (2) et «satanique dans son essence» (3). C’est le sacre de l’humanité» (4) : voilà ce qu’il aurait fallu dire; au lieu de quoi Joseph de Maistre prétend qu’«il n’y a point d’homme dans le monde» ! «J’ai vu, dans ma vie, poursuit-il, des Français, des Italiens, des Russes, etc.; je sais même, grâces à Montesquieu, qu’on peut être Persan : mais quant à l’homme, je déclare ne l’avoir rencontré de ma vie; s’il existe, c’est bien à mon insu.» (5) C’est en dissertant sur la nature des constitutions politiques (6) que Maistre a ces mots d’autant moins acceptables pour nous, qui vivons à l’époque du «droit-de-l’hommisme», comme on entend dire parfois, qu’ils impliquent qu’il ne peut tout bonnement pas y avoir de droits humains. Et non seulement les constitutions ne peuvent être faites pour mais encore par l’homme, car elles ne s’écrivent pas (7) ni ne sont le fruit de délibérations (8). Soit il arrive qu’un homme, tel Lycurgue dans Sparte, donne une constitution à la cité, soit, peut-être plus souvent, la constitution se fait comme d’elle-même, avec le temps (9). Dans tous les cas, les constitutions sont de l’esprit (10) et non pas de papier, et c’est en quelque sorte la Providence qui les écrit, comme toutes choses (11). Les constitutions écrites par les hommes sont à la constitution «certainement divine» (12), ce que les Évangiles sont à la parole du Christ, qui n’a rien écrit (13). Le Verbe, qui ne peut s’écrire de main d’homme, est à l’origine des véritables constitutions.
«Plus on écrit, dit encore Joseph de Maistre, et plus l’institution est faible, la raison en est claire. Les lois ne sont que des déclarations de droits, et les droits ne sont déclarés que lorsqu’ils sont attaqués; en sorte que la multiplicité des lois constitutionnelles écrites ne prouve que la multiplicité des chocs et le danger d’une destruction.» (14) C’est dire si le danger est grand, de nos jours, où des traités constitutionnels de plusieurs centaines de pages sont écrits, auxquels les Français, d’ailleurs, refusent de donner leurs suffrages, lorsqu’il s’agit de les adopter par référendum, ce que faisant, ou plutôt ne faisant pas, car toute la propagande mise en œuvre n’a pas réussi à les persuader qu’ils devaient adopter ledit traité, ils montrent de nouveau l’exemple à l’Europe entière, renouant ainsi avec «cette mission dans le monde» (15) que Joseph de Maistre a toujours reconnue à la France. Cette reconnaissance est d’ailleurs peut-être bien tout ce que les Français, si naturellement fats, trouveraient à leur goût dans l’œuvre du Savoisien : «Chaque nation, écrit-il, comme chaque individu, a reçu une mission qu’elle doit remplir. La France exerce sur l’Europe une véritable magistrature qu’il serait inutile de contester, dont elle a abusé de la manière la plus coupable. Elle était surtout à la tête du système religieux, et ce n’est pas sans raison que son Roi s’appelait très chrétien : Bossuet n’a rien dit de trop sur ce point. Or, comme elle s’est servie de son influence pour contredire sa vocation et démoraliser l’Europe, il ne faut pas être étonné qu’elle y soit ramenée par des moyens terribles.» (16) On croirait du de Gaulle (17), qui avait lu de Maistre, il est vrai.
Tout un livre écrit pour démontrer l’extrême douceur du tribunal de l’Inquisition (18); Les Soirées de Saint-Pétersbourg commençant par un paradoxal et terrifiant éloge du bourreau, sur qui reposerait toute la société (19); voilà qui suffirait à disqualifier pour toujours Joseph de Maistre aux yeux des modernes Français, si dégradés, dirait-il sans doute, qu’on les a vus récemment s’indigner qu’un tyran des plus criminels, dont la culpabilité, connue du monde entier, ne faisait pourtant guère de doute, ait pu être pendu dans Bagdad après un procès qui leur a paru inéquitable, bâclé, voire expéditif ! S’ils savaient ce que leur répond Maistre : «Il est […] possible, dit-il, qu’un homme envoyé au supplice pour un crime qu’il n’a pas commis, l’ait réellement mérité par un autre crime absolument inconnu.» (20) Et le moins qu’on puisse dire est que les autres crimes connus du tyran de Bagdad ne manquent pas.
Comme on voit, l’œuvre de Maistre abonde en ce que Cioran appelle, dans l’essai qu’il lui consacre, des énormités. «Et pourtant, dit Cioran, ce sont ces énormités qui relèvent ses ouvrages et nous les font lire encore.» (21) Quant à moi, je serais tenté d’ajouter, trente ans seulement après l’auteur (22), mais trente années au cours desquelles une autre époque, sans doute, est advenue, que ce sont les énormités par lesquelles mes contemporains s’abaissent qui rendent les ouvrages d’un Maistre plus dignes encore d’être lus. La France de nos jours lui donne raison. Peut-on rien imaginer de plus raisonnable, en effet, que ces énormités toutes prophétiques qui paraissent avoir été écrites pour rendre compte du monde qui semble naître sous nos yeux ?
Lorsque les émeutes des mois d’octobre et novembre 2005 cessèrent enfin, j’étais bien loin de m’attendre à ce qu’on se félicitât de tous côtés que pas une goutte de sang n’eût été versée. Il n’y avait certes pas eu d’effusion de sang, mais les émeutes avaient duré plus de vingt jours ! Un enfant aurait pu déduire que ceci s’expliquait par cela. Non seulement on ne tolère plus, en France, que le sang des coupables soit répandu par la justice après coup, c’est-à-dire sereinement (23), mais encore on ne veut pas que les hommes chargés du maintien de l’ordre le fassent couler au moment même où le crime est commis : pour l’empêcher (24). Pendant ces émeutes, la souveraineté en France a fait défaut, dont c’est pourtant le privilège de répandre le sang pour se préserver. Elle avait oublié cet axiome politique que Maistre classe parmi «les plus incontestables» : «Jamais les grands maux politiques, jamais surtout les attaques violentes portées contre le corps de l’état, ne peuvent être prévenues ou repoussées que par des moyens pareillement violents.» (25)
Est-ce que donc personne, pensais-je en ces heures troublées par des actes d’une telle violence et par tant d’inaction, est-ce que personne n’entend «la terre qui crie et demande du sang» (26) ? Car nous sommes en guerre, même s’il est à peine permis de le dire. Un Maurice Dantec l’écrit d’ailleurs sans détour, lui, dès le début du troisième opus de son Théâtre des opérations : « Autant prévenir mon lecteur, au cas où il ne s’en serait pas rendu compte : nous sommes en guerre.» (27) Eh bien ! Non ! Personne ne semblait s’en être rendu compte, lors des émeutes : nul n’entendit que la terre criait sa soif de sang. Elle n’eut à boire que celui de deux jeunes gens, que tous crurent innocents, mais dont la mort fit tant de coupables. Et si vraiment les deux garçons morts brûlés dans un transformateur électrique étaient innocents, sans doute alors il fallait qu’ils mourussent, aurait pu dire Joseph de Maistre, pour racheter tout le mal qui fut fait après eux, à cause de leur mort : c’était de nouveau «l’innocence payant pour le crime» ! (28)
Après la crucifixion, «nous comprîmes, écrit Maistre, pourquoi l’homme avait toujours cru qu’une âme pouvait être sauvée par une autre, et pourquoi il avait toujours cherché sa régénération dans le sang» (29). Je me demande parfois si cette guerre civile dont quelques-uns, parmi les Français, semblent craindre la venue, mais dont la plupart ne veulent pas entendre parler, serait-ce seulement comme d’une simple éventualité, je me demande si nous ne la désirons pas tous, secrètement peut-être, honteusement ou même inconsciemment, mais surtout : ardemment. En cette époque où le christianisme n’existe déjà presque plus, nous croirions toujours (30), comme aux temps où cette religion n’existait pas encore, nous croirions au salut par le sang et saurions tous, au fond de nous-mêmes, que ce qu’il faudrait à la France, pour la régénérer et sauver son âme, ma main tremble en l’écrivant, c’est l’effusion de notre sang ! Mais cette guerre, qui nous sauvera ou nous perdra, a déjà commencé. On a parlé des émeutes des banlieues. Il aurait fallu dire : la bataille des banlieues, que la France a perdue, tant il est vrai que «c’est l’imagination qui perd les batailles» (31). Les Français ont imaginé qu’aucune guerre n’avait éclaté; à moins qu’ils n’aient au contraire manqué d’imagination pour se lancer dans une guerre qui, peut-être, était très nécessaire. C’est pourquoi l’on prétend qu’il n’y a pas eu l’ombre d’une bataille dans les banlieues française en 2005. Et parce qu’il fallait tout de même trouver les mots pour ne pas dire les choses, on parla seulement d’émeutes ou de crise des banlieues. «L’opinion est si puissante à la guerre qu’il dépend d’elle de changer la nature d’un même événement, et de lui donner deux noms différents, sans autre raison que son bon plaisir.» (32)
Jamais encore la double pensée évoquée par George Orwell dans 1984 n’avait été plus au cœur de la pensée unique. C’est que «les fausses opinions ressemblent à la fausse monnaie qui est frappée d’abord par de grands coupables, et dépensée ensuite par d’honnêtes gens qui perpétuent le crime sans savoir ce qu’ils font» (33). Je ne sais plus à propos de quel fait divers il y a déjà longtemps qu’un journaliste de la télévision avait prononcé cette phrase restée célèbre : «La France a peur». Mais il me semble, à présent que les faits, de moins en moins divers, deviennent plus significatifs, qu’on ne s’entend plus dire, au contraire, que la France ne doit pas avoir peur. De tout le règne du précédent pape lui-même, au moment de sa mort, on ne paraissait avoir retenu que ces mots : «N’ayez pas peur !» (34). Mais c’est la peur ultime : la peur d’avoir peur ! «Et quel homme n’a jamais eu peur dans sa vie ? qui n’a point eu l’occasion d’admirer, et dans lui, et autour de lui, et dans l’histoire, la toute-puissante faiblesse de cette passion, qui semble souvent avoir plus d’empire sur nous à mesure qu’elle a moins de motifs raisonnables ?» (35) Y a-t-il eu jamais moins qu’aujourd’hui de motifs raisonnables de craindre d’avoir peur ? Car il faut bien que les hommes aient de nombreuses raisons de connaître la peur pour se voir à ce point sommés de ne pas la montrer. La superstition les pousse à se convaincre de n’éprouver nulle crainte dans l’espoir insensé, sans doute, de faire disparaître avec elle les raisons réelles qu’il y a d’en avoir. Mais s’«il est honteux de […] craindre» la peur terrible «qui descend dans le cœur le plus mâle, le glace, et lui persuade qu’il est vaincu» (36), il est plus honteux encore, et dangereux, de craindre celle qui monte en l’esprit le plus lucide, avant la bataille, l’échauffe, et le convainc qu’il doit se battre pour vaincre : c’est une peur qui ouvre les yeux et donne du courage. Hélas, de nos jours, l’homme assez courageux pour éprouver cette peur qui, croit-on, n’a pas lieu d’être, risque fort d’être pris pour un lâche. Quant à sa lucidité, elle passera pour de l’aveuglement, quand ce n’est pas pour de la folie.
«Jamais un véritable philosophe ne doit perdre de vue la langue, véritable baromètre dont les variations annoncent infailliblement le bon et le mauvais temps.» (37) C’est en altérant la valeur des mots que les faux-monnayeurs mettent en circulation leurs fausses opinions. Aux bouches d’or a succédé la langue de bois. Le temps a fini par rendre vraie la théorie de Maistre sur le langage, et c’est encore dans les banlieues, espèce de trou noir vers lequel tout semble graviter et devoir s’engloutir inexorablement, c’est là que cette théorie est le plus avérée. Je ne sais plus quel ministre avait affublé du nom de sauvageons tout une jeunesse (38) vivant dans ces cités qui sont comme étrangères au pays, quoique construites en son cœur. Ces jeunes pousses de la plante hideuse et carnivore qu’on voit proliférer autour de nos villes sont des sauvages au sens où Maistre entendait le mot : non pas des primitifs, mais bien des êtres dégradés, dont la langue monstrueuse n’est constituée que des restes (39) de la langue française et des langues étrangères parlées par les parents de certains d’entre eux; langue stérile, incapable de rien dire, comme on a pu voir lors des émeutes de 2005, dont on ne sait toujours pas quel était le message.
Rousseau, nous dit Maistre, «a constamment pris le sauvage pour l’homme primitif, tandis qu’il n’est et ne peut être que le descendant d’un homme détaché du grand arbre de la civilisation par une prévarication quelconque, mais d’un genre qui ne peut plus être répété, autant qu’il est permis de juger ; car je doute qu’il se forme de nouveaux sauvages» (40). S’il avait su ! Lui qui déclare n’avoir rencontré d’homme de sa vie, il me fait souvent penser à une espèce de Diogène qui n’en chercherait pas, parce qu’il se serait trop persuadé qu’il ne s’en trouve nulle part. Mais comme dans La Lettre volée d’Edgar Poe, l’homme est très en évidence dans l’œuvre de Maistre, où le péché originel du second ordre (41) a tant d’importance. Même l’athée que je suis encore, qui ne croit donc pas au péché originel, voit tous les jours de ses yeux se commettre celui du second ordre. C’est l’histoire des hommes depuis toujours. Je ne crois pas en Adam, mais je sais qu’il y a dans tout homme un Adam commettant un péché originel second. Cet Adam commun à tous les hommes est précisément l’homme que Maistre prétend n’avoir jamais rencontré. Il est sous ses yeux : c’est le pécheur. La prévarication qui dégrade absolument l’homme, de nos jours, est le crime qu’il commet contre la langue, crime d’une extrême gravité, parce que c’est l’humanité, par lui, qui est rendue coupable, «l’homme n’étant homme, c’est-à-dire intelligence, que par la parole» (42). Son crime n’est pas tant de parler une langue infiniment dégradée, la seule, le plus souvent, qu’il soit capable de maîtriser (si du moins le mot de maîtrise n’est pas trop disproportionné), que de l’aimer pour sa pauvreté même, et de la défendre ou de l’illustrer. Qu’on songe, par exemple, à ces grotesques sauvageons qui ont fait du rap leur poésie. Parodie de poésie ! Voilà bien le genre de maladie originelle qui peut «gâter toute une race» (43) ! Et l’on sait qu’il n’y a qu’une race : c’est l’humanité.
Si, Diogène à son tour, on cherchait un homme, posant sa lanterne et reprenant, pour éclairer le jour déclinant de la civilisation, le « flambeau de l’analogie » allumé par Joseph de Maistre, on risquerait hélas, à moins qu’avant la fin de la course l’air du temps n’éteigne à tout jamais la flamme tourmentée, comme il arrivait parfois que fît le vent lors des lampadédromies athéniennes, on risquerait, disais-je, de ne trouver déjà plus que des sauvages autour de soi et le désespoir au fond de son cœur; car il est fort à craindre que ce que nous voudrions pouvoir prendre pour des faits divers ou pour de simples crises, ainsi qu’on a dit des émeutes des banlieues, ne soient en réalité, comme écrit Maistre dans son Discours sur la mort du fils de la marquise de Costa : «une époque» (44). Dans la dernière lettre, si belle de simplicité, de modestie et d’affection, qu’écrit à sa mère le jeune Eugène de Costa, qui ne sait pas encore que sa blessure est en train de l’emporter, Maistre relève un italianisme dans le récit que fait le garçon des opérations qu’il subit. «Après deux ans de séjour en Piémont, l’italien commence à poindre dans cet endroit à travers les formes françaises; mais, ajoute-t-il, on sent assez qu’il n’est pas permis de corriger cette lettre.» Quelle était donc cette phrase à peine fautive ? La voici : «Le meilleur chirurgien fut appelé, lequel me fendit la jambe par devant; mais la balle, il ne put la trouver.» Un garçon de seize ans, qui avait fait la guerre et mourait de sa blessure, ne parlait pas plus mal. Qu’on se représente à présent le parler des banlieues, qui est sans doute le modèle de celui qu’ont adopté presque tous les adolescents d’aujourd’hui, dont l’âge est très souvent, quand même ils ont toute leur santé, une interminable et grotesque agonie : quand une fois ils seront délivrés, je veux dire devenus adultes, quelle sorte d’enfants croit-on que feront ces garçons, dont pas un ne porterait heureusement le si beau nom d’Eugène ? L’époque qui vient est celle de la dégénérescence. Dans sa lettre, le jeune moribond s’impatiente de l’arrivée de son frère cadet qui doit faire la guerre, lui aussi : il a treize ans et s’appelle Victor. Victor : le vainqueur. De nos jours, on ne porte plus dignement de tels noms, qui n’ont plus aucun sens.

Notes :
Sur l'expression «flambeau de l'analogie» du titre de l'article (cette note 1 ne figure pas dans le titre afin de ne point l'alourdir) : l’expression se trouve dans le deuxième entretien des Soirées de Saint-Pétersbourg de Joseph de Maistre : «Pour douter à cet égard il faut avoir éteint le flambeau de l’analogie ; c’est-à-dire qu’il faut avoir renoncé au raisonnement», in Les Soirées de Saint-Pétersbourg, Éditions du Sandre, 2006.
(2) Joseph de Maistre, Considérations sur la France, chapitre X, §1, Œuvres de Joseph de Maistre, publiées par la Société nationale pour la propagation des bons livres, Bruxelles, 1844, tome VII.
(3) Joseph de Maistre, Du Pape, Vanlinthout et Vandenzande, Louvain, 1821, discours préliminaire, § 2.
(4) Victor Hugo, Les Misérables, Gallimard, coll. Folio Classique, 1999, p. 82.
(5) Considérations sur la France, chapitre VI.
(6) «La constitution de 1795, tout comme ses aînées, est faite pour l’homme», Ibid.
(7) «Toute loi écrite n’est qu’un mal nécessaire, produit par l’infirmité ou par la malice humaine.» Joseph de Maistre, Essai sur le principe générateur des constitutions politiques et des autres institutions humaines, XXI, in Œuvres de Joseph de Maistre, op. cit., tome VII.
(8) «Aucune constitution ne résulte d’une délibération», Considérations sur la France, chapitre VI.
(9) «Toutes les constitutions libres, connues dans l’univers, se sont formées de deux manières. Tantôt elles ont, pour ainsi dire, germé d’une manière insensible, par la réunion d’une foule de ces circonstances que nous nommons fortuites, et quelquefois elles ont un auteur unique qui paraît comme un phénomène, et se fait obéir.», Ibid.
(10) «La véritable constitution anglaise est cet esprit public, admirable, unique, infaillible, au-dessus de toute éloge, qui mène tout, qui conserve tout, qui sauve tout. – Ce qui est écrit n’est rien.», Essai sur le principe générateur des constitutions politiques, VII.
(11) «Si la Providence efface, sans doute c’est pour écrire.», Considérations sur la France, chapitre II.
(12) Essai sur le principe générateur des constitutions politiques, XXI.
(13) «Au lieu de livres il leur promit le Saint-Esprit.», Ibid., XX.
(14) Considérations sur la France, chapitre VI.
(15) Du Pape, I, chapitre I.
(16) Considérations sur la France, chapitre II.
(17) «Ce qu’il y a, en moi, d’affectif imagine naturellement la France, telle la princesse des contes ou la madone des fresques des murs, comme vouée à une destinée éminente et exceptionnelle. J’ai, d’instinct, l’impression que la Providence l’a créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires. S’il advient que la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, j’en éprouve la sensation d’une absurde anomalie, imputable aux fautes des Français, non au génie de la patrie. Mais aussi, le côté positif de mon esprit me convainc que la France n’est réellement elle-même qu’au premier rang ; que, seules, de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de dispersion que son peuple porte en lui-même ; que notre pays, tel qu’il est, parmi les autres, tels qu’ils sont, doit, sous peine de danger mortel, viser haut et se tenir droit. Bref, à mon sens, la France ne peut être la France sans la grandeur.», Charles de Gaulle, Mémoires de guerre, in Mémoires, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 2000, p. 5.
(18) «Je ne crois pas qu’il soit possible d’imaginer rien de plus doux, rien de plus humain. Si l’on pouvait reprocher quelque chose au tribunal, ce serait un excès d’indulgence.», Joseph de Maistre, Lettres à un gentilhomme russe sur l’Inquisition espagnole, troisième lettre, in Œuvres de Joseph de Maistre, op. cit., tome VII.
(19) «Et cependant toute grandeur, toute puissance, toute subordination repose sur l’exécuteur : il est l’horreur et le lien de l’association humaine. Ôtez du monde cet agent incompréhensible; dans l’instant même l’ordre fait place au chaos, les trônes s’abîment et la société disparaît.», Les Soirées de Saint-Pétersbourg, premier entretien.
(20) Ibid.
(21) Cioran, Joseph de Maistre, essai sur la pensée réactionnaire in Exercices d’admiration, Gallimard, coll. Quarto, 1995, p. 1558.
(22) L’essai de Cioran fut publié une première fois en 1977, avant d’être repris dans les Exercices d’admiration en 1986.
(23) «Parmi nous, l’ordre est tout différent [de celui des mahométans] : il faut que le coupable soit arrêté; il faut qu’il soit accusé; il faut qu’il se défende; il faut surtout qu’il pense à sa conscience et à ses affaires; il faut des préparatifs matériels pour son supplice; il faut enfin, pour tenir compte de tout, un certain temps pour le conduire au lieu du châtiment, qui est fixe. L’échafaud est un autel : il ne peut donc être placé ni déplacé que par l’autorité; et ces retards, respectables jusque dans leurs excès, qui de même ne manquent pas d’aveugles détracteurs, ne sont pas moins une preuve de notre supériorité.», Les Soirées de Saint-Pétersbourg, dixième entretien.
(24) Maistre condamne évidemment l’usage qu’il y a chez les mahométans d’exécuter les coupables sur le champ. «Sous l’empire de la loi mahométane, écrit-il, l’autorité punit et même de mort l’homme qu’elle en juge digne au moment et sur le lieu même où elle le saisit; et ces exécutions brusques, qui n’ont pas manqué d’aveugles admirateurs, sont néanmoins une des nombreuses preuves de l’abrutissement et de la réprobation de ces peuples.», Ibid. Mais Maistre dit bien «au moment et sur le lieu même où elle le saisit», c’est-à-dire après que le crime a été commis. Je parle quant à moi du moment même où le crime est commis et peut encore être empêché. La différence est de taille.
(25) Lettres à un gentilhomme russe sur l’Inquisition espagnole, première lettre.
(26) Les Soirées de Saint-Pétersbourg, septième entretien.
(27) Maurice G. Dantec, American Black Box, Albin Michel, 2007, page 26. Il dit ailleurs (page 13) que «les émeutes ‘‘talibanlieusardes’’ se transforment en actes de guerre».
(28) Considérations sur la France, chapitre III.
(29) Les Soirées de Saint-Pétersbourg, neuvième entretien.
(30) «Mais la croyance dont je vous parle ne souffre aucune exception de temps ni de lieu. Nations antiques et modernes, nations civilisées ou barbares, époques de science ou de simplicité, vraies ou fausses religions, il n’y a pas une seule dissonance dans l’univers.», Ibid.
(31) Ibid., septième entretien.
(32) Ibid.
(33) Ibid., premier entretien.
(34) En réalité, Jean-Paul II avait dit, dans son homélie du dimanche des rameaux, le 4 avril 2004 : «Le message que nous transmet la Croix n’est certainement pas facile à comprendre à notre époque, où le bien-être matériel et le confort sont proposés et recherchés comme des valeurs prioritaires. Mais vous, chers jeunes, n’ayez pas peur de proclamer en toute circonstance l’Évangile de la Croix. N’ayez pas peur d’aller à contre-courant !». Aller à contre-courant, ce peut être avoir peur malgré l’interdiction qui en est faite aux hommes, et les chrétiens, par exemple, seraient bien avisés de craindre qu’il ne se trouve bientôt plus personne pour dire : «nous voulons voir Jésus» (Jn, 12, 21, que le pape citait en exergue de son discours).
(35) Les Soirées de Saint-Pétersbourg, septième entretien.
(36) Ibid.
(37) Essai sur le principe générateur des constitutions politiques, LIX.
(38) Ce qui n’est pas la même chose que toute la jeunesse.
(39) «Et non des rudiments de langue», Les Soirées de Saint-Pétersbourg, deuxième entretien.
(40) Ibid.
(41) «Il y a telle prévarication ou telle suite de prévarications qui peuvent dégrader absolument l’homme. C’est un péché originel du second ordre, mais qui nous représente, quoique imparfaitement, le premier.», Ibid.
(42) Du Pape, I, chapitre X.
(43) Les Soirées de Saint-Pétersbourg, deuxième entretien.
(44) Discours à Mme la marquise de Costa sur la vie et la mort de son fils Eugène, in Joseph de Maistre, collectif dirigé par Philippe Barthelet, Éditions L’Âge d’Homme, 2005, coll. Les Dossiers H.

L’auteur
Né en 1975, Olivier Bruley tient un blog intitulé Un Jardin d’Adonis, dans lequel il publie son journal intime, ainsi que quelques-uns de ses sonnets.