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26/05/2019

Nostromo de Joseph Conrad

Crédits photographiques : B. Mathur (Reuters).

«It's crashing. It's crashing terrible. It's burst into flames... get this, Scotty, get this, Scotty... Get out of the way, please, oh, my, this is terrible, oh, my, get out of the way, please !
It is burning, burst into flames and is falling on the mooring mast and all the folks we... this is one of the worst catastrophes in the world !... Oh, the flames, it's four or five hundred feet into the sky, it's a terrific crash, ladies and gentlemen... The smoke and the flames now and the frame is crashing to the ground, not quite to the mooring mast. Oh, the humanity and all the passengers.»
Herb Morrisson décrivant le Hindenburg en flammes, le 6 mai 1937 (Lakehurst dans le New Jersey).

«The Hindenburg has gone. Her tragedy will not halt the march of progress. From her ashes will arise the knowledge, from her fate, the lesson, that will lead to a greater and a better means of mastering the air. If so, her dead will not have died in vain.
The Hindenburg has gone. She was the largest thing that ever flew. She represented man’s latest attempt to conquer the Atlantic by air. Her tragedy will not halt the march of progress.
From her ashes will arise the knowledge.»
Paroles extraites de la scène IV (intitulée I couldn’t understand it) de Three Tales (1998-2002) de Steve Reich.


Nostromo.JPGCe qui frappe dans Nostromo, l'un des plus grands romans de Joseph Conrad avec Lord Jim, Victoire et bien sûr Cœur des ténèbres qui est une longue nouvelle, ce n'est pas la complexité de la trame narrative, les libertés fulgurantes prises avec la chronologie des aventures façonnant l'imaginaire république sud-américaine du Costaguana, la fluidité de l'écriture ni même la facilité déconcertante avec laquelle l'écrivain, usant pourtant d'une focalisation toute simple (pour ne point avoir à utiliser le commode charabia de Gérard Genette qui écrirait : une focalisation zéro ou narrateur omniscient), paraît nous donner l'illusion qu'une multitude de narrateurs travaillent pour un seul et lui font leur rapport, alors que celui-ci, qui passe d'une scène à l'autre, d'un jour à l'autre, d'une époque à l'autre avec la même légèreté que le vent soufflant sur l'abîme des premiers âges, compose, pour ainsi dire sous nos yeux, le texte que nous lisons comme s'il s'agissait de fabriquer un seul tapis à partir d'une multitude de motifs, de fils et même de tissus hétérogènes.
D'accord avec Franck Lessay : Nostromo, roman postclassique «si le classicisme du roman européen s'incarne en Balzac ou Tolstoï», surclasse toutes les mièvres inventions procédurières du Nouveau Roman, ce rapport de préfecture consignant les audaces paralysées et les trouvailles percluses, qui porte de plus en plus mal son titre pompeux, ainsi que les «œuvres engagées du demi-siècle qui suit la Première Guerre mondiale». Autant dire que le roman de Conrad est intemporel, sans doute parce qu'il ne cherche d'aucune façon à révolutionner le genre romanesque et, ainsi animé d'intentions modestes et génialement monstrueuses, dépasse de dix mille coudées les claironnants jeunes premiers du genre.


La suite de cet article figure dans Le temps des livres est passé.
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