« La nécessité de la poésie après Auschwitz : quatre poèmes, par Gregory Mion | Page d'accueil | Les Français de la décadence d'André Lavacourt : (riche) dossier sur un roman maudit »
03/01/2025
Sur les traces d'André Lavacourt : nouvelles découvertes et nouvelles énigmes
Photographie (détail) de Juan Asensio.
Sur Les Français de la décadence d'André Lavacourt.
Les Français de la décadence d'André Lavacourt dans le dos noir du temps.
Les Français de la décadence d'André Lavacourt ou le véritable Roi en jaune de la littérature française.
Découvertes...
Tout grand roman convoque, directement ou par des voies obliques, parfois invisibles, du moins généralement impénétrables, d'autres romans, et il n'est donc pas vraiment anodin que des romans monstrueux, comme c'est le cas pour Les Français de la décadence, ne serait-ce que par le temps qu'il faut à tout honnête lecteur, et j'en suis un, pour lire ces quelque 600 denses pages, entremêlent leur trame avec celles d'autres romans non moins monstrueux, et qu'il faut bien du temps pour parvenir à terminer de lire, en parcourir, parfois même en reparcourir les dédales, si tant est qu'à la durée d'une pareille lecture ne s'ajoutent les mois, les années parfois, qu'il faut à ce même honnête lecteur que je m'honore d'être pour oser ouvrir un livre, et non seulement l'ouvrir mais y entrer pour de bon et le lire de sa première à sa dernière page. J'ai ainsi plus d'une fois remis au lendemain ma lecture de romans qui, pourtant, me fascinaient avant même que je ne les lise, précédés qu'ils étaient non pas du bruissement caractéristique de criée qui selon Julien Gracq compte tant pour la réputation d'un livre, en France plus précisément et même, surtout, à Paris, mais d'un trouble chuchotement de voix point toutes chaudes ni mêmes agréables à écouter.
Les études que je conduis depuis plusieurs mois sur le roman de Lavacourt évoquent d'autres livres, ne peuvent rien faire d'autre que d'évoquer et de convoquer d'autres livres, ou bien sont au contraire ravivées par d'autres lectures, d'ailleurs similaires en bien des points, comme c'est le cas pour Paradiso de José Lezama Lima et pour Le Voyage de Shakespeare de Léon Daudet. En effet, en plus, même, d'une similitude d'intention, puisqu'il s'agit, pour ces trois écrivains, d'embrasser en un livre la totalité de l'expérience humaine possible, tout l'ensemble, pourtant inimaginable, des connaissances, nous pourrions parler d'une ressemblance d'ordre quasiment physique, dans le sens où cet appétit de savoirs et d'expériences esthétiques est servi par une écriture puissante, aux reins non seulement perpétuellement féconds mais constamment cabrés. C'est en somme une identique exubérance verbale, quelque folle prodigalité de langage que je vois à l’œuvre dans trois romans que tout semble, comme toujours en surface, différencier, mais qu'un jaillissement aux connotations sexuelles évidentes unit à la source, le langage bien sûr, et un langage sûr de sa souplesse, de son infinie malléabilité, de sa magie évocatoire, somptueusement fécondante, éminemment rabelaisienne chez celui que l'on a surnommé le Proust des Caraïbes ou bien chez l'infatigable Léon Daudet qui, lui, fit beaucoup pour saluer le génie de Proust, le premier pouvant décrire une scène où l'un de ses jeunes personnages est fasciné par son oncle Alberto, lorsqu'il sent «les mots prendre leur relief» et aussi sur ses propres joues «un vent léger faire frémir ces mots et leur communiquer une allure, telle encore la brise et sa pression sur le péplum des panathénées, dont le sens oscillait, se perdait puis réapparaissait comme une colonne au milieu du ressac, pleine d'invisibles alvéoles formés par les morsures des poissons», alors que le second, lui, par l'entremise de Fischart, se considérant lui-même comme un «assembleur de mots», affirme qu'il lui arrive de laisser ces derniers «se joindre sur notre page à la débandade, ainsi que des soldats affolés dans une fuite ou un assaut». Alors, «Par un mécanisme que j'emploie sans me l'expliquer, on fait dans son imagination une demi-obscurité où les syllabes s'attirent par leurs consonances, les verbes grimpent sur les épaules les uns des autres, les substantifs impurs fécondent les épithètes, et celles-ci prennent un relief singulier, se dressent aux points importants de la phrase, comme de grosses sentinelles brillantes». Enfin, dernière de nos trois forces de la nature, du moins en matière de littérature, André Lavacourt n'est pas en reste, qui fait couler les phrases comme des jus de charogne tout pressés d'aller féconder une terre gaste, histoire qu'en sortent, qui sait, de dolentes monstruosités qui eussent ravi les narines de Des Esseintes.
Mais il s'agit bel et bien de tout dire dans les trois cas, l'un par la surabondance des savoirs accumulés, qui se déroulent en de longues explications données par tel ou tel personnage discourant sur Aristote, saint Augustin ou Nietzsche, le sort de Satan à la fin des temps, l'autre par la figure complexe et chatoyante du prince incontestable de la dramaturgie, qui aspire à tout comprendre et, surtout, à tout rendre perceptible par la complexité de ses pièces de théâtre, le dernier enfin en entrecroisant les trames romanesques comme autant de visions originales passant par des styles de langue raffinés ou parfaitement et à dessein sordides. En tout cas, ce ne sont pas les personnages de Paradiso qui se plaindraient d'avoir trop à découvrir ou à apprendre, l'un d'entre eux, judicieusement baptisé Fronesis pouvant ainsi fasciner ses amis par «sa désinvolture dans le domaine culturel; non seulement on voyait qu'il avait picoré à bien des branches de l'arbre du savoir universel, mais il enveloppait ensuite dans ses propres feuilles l'amande d'une passion critique exacerbée. Il apprenait puis pulvérisait ce qu'il avait appris avec une même dignité critique, dans la continuité et la plénitude de l'esprit».
Je faisais au contraire part, dans ma dernière note consacrée aux Français de la décadence, de mon découragement à récolter le moindre indice un peu significatif sur ce roman et son auteur, comparant l'espèce de bizarre présence de ce texte oublié à quelque maligne infestation, dans mon esprit du moins, propagée par Le Roi en jaune, le Necronomicon ou même le De Vermis Mysteriis, autant d'ouvrages fictifs réputés aussi peu recommandables que puissants dans leur capacité à déliter la raison de ceux qui avaient l'outrecuidance de les lire, n'en serait-ce que quelques pages ou même lignes. Cependant, ce qui serait susceptible de me faire perdre non pas la raison mais la patience, que j'ai pourtant grande, ce serait plutôt la longue file de questions que soulève cette occultation d'un magnifique roman polémique et politique, prophétique comme le sont tous les romans qui se moquent de désigner trop précisément tel ou tel envahisseur, qu'il soit jaune, rouge ou noir, mais insistent sur un écroulement intérieur de la France (et, comme tout texte prophétique, n'annoncent pas seulement le futur mais stigmatisent de furieuse façon le présent, voir Les Décombres de Rebatet ou Les Beaux Draps de Céline), et non pas tant de questions qu'il n'est même pas plaisant de faire chatoyer dans son esprit, en sachant qu'une multitude de réponses ont été apportées par une multitude d'auteurs, mais de questions, pour le coup, qui se confrontent à une absence assez significative de réponses, assez significative et même : désespérante.
C'est donc à point nommé, au moment où j'allais finir par tomber dans un franc découragement et renvoyer à ses limbes Les Français de la décadence, que j'ai été autorisé, miraculeusement ou peu s'en est fallu, à pénétrer dans le Saint des saints, en l'occurrence les Archives de l'éditeur du roman, Gallimard, par une personne (elle se reconnaîtra si elle me lit) qui a salué la passion avec laquelle je m'obstinais à en savoir plus, toujours plus, sur un roman à bien des égards colossal, monstrueux, ainsi que sur un écrivain qui, lui, aura passé son temps à tenter d'effacer ses traces, étant parfaitement d'accord avec tel propos de B. Traven («la biographie d'un auteur n'a absolument aucune importance», un créateur n'ayant «d'autre biographie que son œuvre»), auteur anarchiste dont il ne sut probablement rien du tout, indiquant plus d'une fois à son éditeur, Gallimard donc, qu'il ne détestait rien tant que d'être exposé en pleine lumière, tout en ne cessant, et c'est un paradoxe après tout assez peu profond, d'écrire et de tenter de faire publier ce qu'il écrivait, romans, reportage et même pièce de théâtre, d'autres textes peut-être, comme celui qu'il avoua avoir été emporté, métaphoriquement ou alors bien réellement, par le tremblement de terre qui ravagea la ville d'Agadir en 1960. Fort généreusement, j'ai donc eu accès le 21 novembre 2024 à l'ensemble des archives relatives à notre auteur, y compris les bons de tirage et autres feuilles détachées bardées de chiffres qui ne m'ont jamais intéressés (ce secret sera donc bien gardé !), et j'ai pu également photographier ce que je souhaitais photographier, c'est-à-dire tout, le dossier que Gallimard possède sur Lavacourt étant finalement assez peu épais mais fort riche d'enseignements... et faisant éclore, comme il fallait s'y attendre, un bouquet de nouvelles questions comme autant de fleurs noires présentant la particularité de ne jamais faner.
Sans m'étendre sur les détails, comme par exemple la découverte d'une critique dont j'ignorais l'existence, signée Kléber Haedens dans Paris-presse L'Intransigeant du 20 août 1960, je puis affirmer qu'André Lavacourt, dont le prénom était Jean-Pierre (et même Jean-Pierre Henri, né en 1921 et mort en 2006 à Issy, selon les recherches d'un ami ?) (1) et non Pierre et dont le vrai nom, Couturier, nous était déjà connu, a visiblement beaucoup écrit comme lui-même l'affirme dans un texte intitulé Note jointe au questionnaire (2) que son éditeur lui envoya pour se présenter, ses textes, dont certains ont été envoyés chez Gallimard, n'ayant pas obtenu ses faveurs, hormis bien évidemment, et sur recommandation spéciale de Raymond Queneau avec lequel Lavacourt échangeait en fait depuis plusieurs années comme nous le verrons, le seul roman publié que nous connaissons de lui, mais qui n'en a pas moins disparu, alors même qu'un nombre qui me semble après tout point du tout risible a été vendu. Où diable sont passés tous ces exemplaires vendus, je le répète en nombre point ridicule, alors même que nous trouvons sur le marché de la revente bien des livres qui, d'un strict point de vue matériel, en somme, sont finalement beaucoup plus rares que Les Français de la décadence, y compris même si l'on tient compte des exemplaires qui ont été pilonnés ? J'ai évoqué l'existence de plusieurs textes, dont nous ne savons aujourd'hui strictement plus rien, si ce n'est ce qu'en a dit André Lavacourt. C'est par exemple le cas pour un texte intitulé Histoire racontée par un mort, cinquième volume, pas moins, d'une série intitulée Fargeas, que l'intéressé commente ainsi dans une note intitulée Mes romans de la série Fargeas jointe à un courrier daté du 5 février 1982, date à laquelle, après une éclipse de plus de 20 années, l'auteur reprend donc langue avec son ancien et unique, jusqu'à preuve du contraire, éditeur : «J'ai tenté de faire du nouveau, d'une part en utilisant une façon d'écrire qui réveille, je crois, l'intérêt du lecteur, et d'autre part en ne traintant (sic, corrigé par l'auteur d'un trait) guère que de paranormal et d'inexpliqué», et de poursuivre en affirmant qu'il y a, «pour chaque roman, deux solutions possibles : l'une tout à fait irrationnelle et l'autre plus normale. Bien entendu ajoute Lavacourt, je fais du pied au lecteur pour qu'il préfère la première !».
André Lavacourt, dans ce même passage aussi étonnant qu'instructif, annonce à son éditeur que son «nom de guerre ne passera pas inaperçu», «les titres non plus», du moins l'espère-t-il, avant de donner la liste des textes qui sont, «pour l'instant», «tapés au propre (ou presque...)» :
1 - Il neige ce soir à Singapour
2 - Si c'était vrai !...
3 - Le trente février
4 - C'était hier demain
5 - Histoire racontée par un mort enfin, que nous connaissons donc, bien que Lavacourt précise immédiatement qu'il en a beaucoup d'autres, de ces textes écrits, rédigés plutôt, avec «toujours le même personnage principal» puisqu'il s'agit «d'une série qu'on peut continuer indéfiniment si les lecteurs montrent du goût pour ces aventures». Dans une Note à propos de [ses] romans populaires, l'auteur précise encore qu'il a signé ces derniers d'un «nom d'emprunt qui intriguera un peu», le nom d'André Lavacourt, lui, étant réservé «à des choses plus sérieuses dont [ses] tiroirs débordent». On comprend que cette série de textes ne soit qu'alimentaire puisqu'il indique encore qu'il est capable d'en «pondre à dates régulières» et, même s'il ne les prétend pas «prodigieux», il les croit tout de même «valables dans leur genre», s'amusant même à dessiner, «pour chacun d'eux», une couverture, ses «prétentions, à ce sujet, [étant] tout à fait limitées» nous rassure-t-il, ce dont nous ne pouvons en effet douter.
Hélas, par une lettre du 21 juin 1982, Gallimard signifie à Lavacourt son refus de publier «l'exemplaire de [sa] série Fargeas» car il juge que c'est «un ouvrage d'un genre tout différent» de celui qu'il publie habituellement. D'ailleurs, dans cette même lettre, Gallimard annonce quand même une bonne nouvelle à Jean-Pierre Couturier puisqu'il l'assure qu'un autre de ses textes, intitulé, lui, Au-delà de la ville du bout du monde, est «un roman bien mené, avec des épisodes qui s'enchaînent les uns aux autres très efficacement», alors que «la passion du héros est convaincante», et «les descriptions du Maroc fort belles», et cela bien que «le dénouement [en soit] peu crédible» et «les dialogues souvent sans grand bonheur. L'annonce faite à Lavacourt, en fin de compte, n'est point si positive que cela, Gallimard concluant son propos en évoquant un autre texte de Lavacourt qui, décidément, n'a pas dû beaucoup hésiter à adresser à l'éditeur de ses Français de la décadence, que dans une lettre plus ancienne il déclare admirer, tout ce qu'il écrivait ou peu s'en faut, texte s'intitulant Précisions données par un mort, qu'il conseille d'adresser à un autre éditeur, Les Presses de la Cité en l'occurrence. Quoi qu'il en soit de ces réserves, ces deux textes ont été engloutis, encore plus sûrement que si la terre marocaine les avait avalés.
Ce n'est pas la seule fois que l'un des textes de Lavacourt sera réorienté vers un autre éditeur que Gallimard, puisque ce que l'auteur appelle un reportage, La vérité sur le Maroc, a été évoqué auprès de Jean d'Halluin, patron des éditions du Scorpion (3), sans doute par l'infatigable passeur qu'était Raymond Queneau, du reste auteur, mais sous pseudonyme, dans cette même maison, qui écrit donc une lettre à Lavacourt datée du 1er juin 1959 où il lui demande de le lui faire parvenir, au cas où il n'aurait pas encore été publié, «pour lecture» !
De la même manière, c'est encore Raymond Queneau qui joua les habiles agents littéraires pour faire publier en feuilletons un autre texte de Lavacourt, intitulé Il pleut sur l'Oise dans l'éphémère Tout sur tout. L'hebdomadaire du rire et de la lecture, du numéro du 28 juin 1941 à celui du 23 août de la même année, l'écrivain affirmant à Lavacourt, dans une lettre du 23 septembre 1960, qu'il n'avait pas eu de mal «à retrouver dans les archives (bien tenues) de cette maison [sa] fiche de lecture» rendant «un avis favorable» sur un texte dont il déclare se souvenir fort bien puisque «la description du milieu spirite de banlieue [lui] avait particulièrement plu», même s'il concède ne pas avoir «l'impudeur» de prétendre qu'il se souvient dudit texte dans «tous [s]es détails». Voici donc le fruit de ces recherches : nous pouvons pour l'heure affirmer avec certitude que Jean-Pierre Couturier alias André Lavacourt est l'auteur de plusieurs textes courts parus dans la revue Arcadie, sur lesquels nous allons nous attarder plus avant, d'un court roman, une nouvelle plutôt, parue en 9 feuilletons dans Tout et tout, mettant en scène un personnage du nom de... Fargeas qui, visiblement, a dû apparaître dans d'autres manuscrits, et enfin du seul roman véritable que nous possédions de lui, Les Français de la décadence, pièce maîtresse d'un puzzle éditorial et littéraire qui restera sans doute à jamais inachevé, sauf propitiatoire découverte d'une malle débordant de textes tapés à la machine.
Quel sanglant sacrifice dois-je commettre pour qu'un démon ténébreux m'accorde cette faveur, que j'aiguise dès maintenant la lame de mon couteau ?
...et déconvenues
Mes recherches auprès des descendants de la famille Herbelin, dont André Lavacourt était le cousin si l'on en juge par la forcément rarissime dédicace d'un exemplaire de son roman, n'ont rien donné, pas davantage que celles que j'ai continué de mener pour tenter de retrouver des témoignages directs ou indirects via des auteurs ayant pu participer à l'aventure éditoriale que fut la revue Arcadie même si, à ce propos, j'ai encore déniché un texte de Lavacourt, intitulé Aspects d'Afrique du Nord, paru dans le numéro 3 (ou 15, suivant la double numérotation en vigueur jusqu'au numéro du mois de juin 1955) du mois de mars 1955 (pp. 33-8). Ce texte ne présente guère de différence avec celui qui le suivra dans le numéro 4 et dont j'ai déjà parlé dans une précédente note.
Effectuons un petit détour du côté de nos chers éditeurs; le 16 septembre 2024, à l'occasion d'un verre pris avec Éric Naulleau au Cannibale faisant suite à deux autres rendez-vous avec Stéphane Barsacq et Sébastien Lapaque (il faut savoir écluser beaucoup de verres dans ce genre de cas délicat) avec lesquels, bien évidemment, j'ai évoqué l'aberration concernant la disparition pure et simple d'un roman tel que Les Français de la décadence, j'ai pu être conseillé, avec une belle unanimité d'ailleurs, sur la question la plus épineuse de ma quête, aussi frénétique que désespérée, ne trouvant pas facilement une réponse satisfaisante à cette question pourtant cruciale : quel éditeur, dans la France de plus en plus a-verbale même si, dans un mouvement contraire quoique logique, de plus en plus bavarde, quel éditeur suffisamment amoureux des lettres et courageux pour envisager une réédition du monstre d'André Lavacourt ? Naulleau comme Barsacq, Lapaque même, tout occupé à me dédicacer son dernier bel essai romancé, m'ont donné plusieurs noms que je tairai, sauf ceux des deux éditeurs auxquels je me suis adressé, Séguier donc, que nous avons connu inspiré avec Léon Daudet et passablement lamentable à propos de Maurice G. Dantec évoqué par le nain phocomèle Hubert Artus, puis La Table Ronde; si Séguier, à l'heure où je relis cette note, n'a toujours pas répondu à ma brève et belle lettre de château, La Table Ronde, sous la personne flasque du Service des manuscrits, m'a envoyé par un courriel de quelques mots une amusante réponse, faisant écho je le suppose à une de mes critiques publiques sur cette maison autrefois fort intéressante et surtout très courageuse, alors qu'elle n'édite plus (le verbe est trop fort, préférons-lui : fait) que de consensuelles rinçures, sous de moches couvertures, comme un simple coup d’œil jeté sur son navrant catalogue nous l'indique assez, réponse me disant donc que c'était sa nullité éditoriale même qui l'empêchait de rééditer le chef-d’œuvre d'André Lavacourt ! Vous vous doutez bien, mes chers lecteurs, que je me suis dépêché, toujours publiquement et signant, pour ma part, mes déclarations de mes prénom et nom, d'exposer ladite criante nullité éditoriale dont je venais d'obtenir confirmation, ironisant à mon tour sur le fait que le pauvre Michel Déon, qui nous le savons salua de magnifique façon le roman de Lavacourt, devait pleurer d'obscures et amères larmes en constatant la dramatique indigence littéraire, et peut-être même intellectuelle, de sa fille, Alice Déon dirigeant La Table Ronde avec un goût aussi certain, infaillible même, à de rarissimes exceptions comme toujours soyons justes, pour la daube germanopratine qu'un cochon vous déterre une truffe enfouie sous 2 mètres de terre bien tassée.
Ai-je dit mon dernier mot ? Non bien sûr, car c'est après avoir envoyé ces deux missives implorantes qu'un éditeur m'a contacté pour évoquer le grave sujet qui nous entretient mais vous me permettrez, sur cette discussion, d'être au moins aussi discret et évasif que doit l'être la capacité d'Alice Déon à tenir une conversation réellement littéraire, je veux dire : avec d'autres gens que des sots commerciaux qui, de la littérature, ne savent que les chiffres de ventes et de méventes, ce qui est après tout bien suffisant pour une boutiquière dont la culture littéraire doit confortablement tenir dans deux colonnes de fichier Excel.
Notons encore, à ce même propos douloureux que la longue de mes détours m'oblige à rappeler : ma quête fiévreuse, dunsanienne et même faulknérienne d'une introuvable Carcassonne éditoriale, notons que j'ai pu consulter le fonds Arcadie déposé à La Contemporaine même si je n'y ai trouvé aucune trace de correspondance entre Lavacourt et André Baudry qui dirigea la revue du début à la fin, alors que je me suis poissé le regard en lisant des dizaines de petites annonces entre Arcadiens (et Arcadiennes, mais de façon moindre !) bien contents de s'emmêler les tuyaux. Pour l'heure, l'une des deux lettres adressées à deux des anciens membres sont restées sans réponse, tout comme le courriel envoyé à un certain Arno Schmitt, auteur d'une introuvable étude intitulée Bio-bibliography of male-male sexuality and eroticism in muslim societies publiée en 1995 chez Verlag Rosa Winkel. L'unique réponse pour l'heure reçue est intéressante : mon destinataire, s'il n'a jamais entendu parler d'André Lavacourt au sein de la revue, ou plutôt du cercle, pour le coup, d'Arcadie, m'a appris que son fondateur, André Baudry donc, avait détruit l'ensemble des documents et fichiers qui auraient permis d'identifier les Arcadiens signant sous pseudonyme (comme mon correspondant, dont je ne révélerai bien évidemment pas l'identité), Baudry se flattant même d'avoir personnellement «protégé l'incognito des contributeurs de la revue ayant écrit sous pseudonymes». Mon interlocuteur, lorsqu'il me livre une de ses propres interrogations, me devient tout à coup précieux puisqu'il m'affirme s'être demandé si, dans le texte de Lavacourt intitulé Le général de Gaulle est à l'Hôtel de Ville (numéro du mois de janvier 1956), l'auteur ne nous aviat pas livré un portrait à charge de Roger Stéphane, lui-même ayant accueilli ledit général de Gaulle alors qu'il avait pu juger ses propres exploits quelque peu surévalués (voir Tout est bien). L'intéressé s'étant visiblement reconnu dans ce portrait peu flatteur de celui qui avait avoué avoir «joué l'important», mon correspondant se demande si ce n'est pas là la raison véritable de l'animosité de Roger Stéphane à l'endroit de la revue Arcadie. Peut-être même, ce risque cet ancien contributeur d'Arcadie, peut-être même que Roger Stéphane et André Lavacourt se sont rencontrés, dans la mesure où ce dernier, qualifié de «hussard, de style caustique», dont les «chroniques arcadiennes semblent à base d'autobiographie et de vécu» (l'auteur souligne les termes «hussard», «caustique» et «vécu») ? Dans ce cas, c'est auprès des «souvenirs des écrivains homosexuels» qui «continuèrent, après la Libération, une petite guéguerre de papier» qu'il y aurait, qui sait, quelques éléments à glaner...
C'est toutefois encore dans Arcadie, précisément le numéro double 7-8 publié en juillet-août 1954, qu'André Lavacourt a pu lire une recension du Vieillard et l'enfant signée Jacques Remo, un roman qu'il apprécia, signé par un certain Abdallah Chaamba qui n'était autre que François Augiéras. Dans Arcadie toujours, mais cette fois-ci dans le numéro 76 datant du mois d'avril 1960, une autre recension concerne Le voyage des morts de Chaamba / Augiéras. Je suis même allé jusqu'à chercher des traces physiques de l'aventure arcadienne, en essayant par exemple de retrouver les anciens patrons d'un restaurant où se réunissait notre fine équipe, Charly de son nom, situé au 9 rue d'Argenteuil mais dont il ne reste plus rien, un nouveau restaurant, sans doute assez peu préoccupé de problématiques arcadiennes, ayant investi l'ancien local.
Je rappelle donc, en guise de résumé, qu'André Lavacourt a selon toute vraisemblance fait paraître cinq textes dans la revue Arcadie, mon minutieux dépouillement de tous les numéros parus s'étendant des années 1960 à 1970 ne m'ayant pas permis de dénicher quoi que ce soit d'autre, même si, bien sûr, une étourderie est toujours possible, vu que je n'ai été secondé, dans cette recherche, d'aucun outil électronique qui m'eût été bien utile. Sous toute réserve, nous disposons donc du corpus de courts textes suivant :
- Numéro 3, mars 1955, pp. 33-8 : Aspects d'Afrique du Nord (sous le nom de Lavaucourt).
- Numéro 4, avril 1955, pp. 28-36 : Aspects d'Afrique du Nord. Morales (là encore sous le nom de Lavaucourt).
- Numéro 25, janvier 1956, pp. 32-41 : Le général de Gaulle est à l'Hôtel de Ville.
- Numéro 26, février 1956, pp. 29-34 : Sérénade pour un traître.
- Numéro 28, avril 1956, pp. 32-8 : Corydon chez Diafoirus.
D'autres pistes, un temps suivies, semblent aussi ne mener nulle part comme celles concernant des précisions d'ordre biographique; j'ai déjà mentionné mes tentatives infructueuses auprès des descendants de la famille Herbelin, cousin de Lavacourt, mais je pourrais faire les mêmes remarques concernant des demandes, restées pour l'heure sans réponse, auprès de telle ou telle administration algérienne, sur place même, par l'entremise d'un lecteur m'ayant envoyé des photographies récentes d'un quartier où Lavacourt, enfin, le Docteur Pierre Couturier en l'occurrence, avait vécu et exercé, 4 bis boulevard Lyautey, Fort de l'eau (Le Lido) à Alger ou encore, plus près de nous, auprès de l'Ordre national des chirurgiens-dentistes, relancé le 13 novembre et qui doit apparemment, pour me livrer une pauvre date d'obtention d'un titre de docteur, se réunir en saint conclave et veiller à ce que les informations éventuellement communiquées puissent passer sous les très lourdes fourches caudines du secret le plus impénétrablement gardé. C'est d'autant plus dommage puisque Lavacourt affirme, dans l'une de ses lettres, qu'il a pu être amené à rédiger des articles ayant trait à sa pratique de dentiste !
Pas davantage n'en ai-je appris sur l'épisode éditorial Jean d'Halluin, visiblement avorté, peut-être en raison de la très piètre réputation des éditions du Scorpion sur la place publique parisienne, comme a pu me le suggérer François Darnaudet (4) que je remercie pour sa diligence et son efficacité, auteur d'une étude plus que fouillé sur l'aventure éditoriale de cette maison; lorsque je l'ai questionné en lui citant l'exemple d'André Lavacourt, François Darnaudet m'a appris l'existence d'une autre anecdote, concernant un roman de Jean Forton, en 1959. Auteur de plusieurs romans chez Gallimard, ce dernier s'était vu proposer par Jean d'Halluin, qui avait visiblement ses entrées chez Gallimard, de lui publier un de ses romans policiers refusé par d'autres éditeurs parisiens, dont La Table Ronde et peut-être même Gallimard, m'a précisé François Darnaudet, que je me permets de citer pour la suite : «Jean Forton avait demandé conseil à Gallimard et Gallimard lui a envoyé un courrier pour lui conseiller fortement de ne pas publier au Scorpion afin de ne pas se discréditer sur le plan littéraire. Le Scorpion avait mauvaise réputation pour de nombreuses raisons» que l'auteur détaille dans son livre.
Une autre de mes déceptions concerne la presque totale absence de mention des Français de la décadence dans tout livre de type encyclopédie ou dictionnaire, et Dieu sait qu'il en existe plusieurs de plus ou moins grande qualité, ayant de près ou de loin un rapport avec la science-fiction ou l'utopie (5) car enfin, faut-il rappeler que le roman de Lavacourt, écrit probablement dans les années 50 et publié en 1960, imagine une France se décomposant subitement dans les années 1972-1973 ? Voilà qui est d'autant plus dommage que Lavacourt, nous l'avons dit, n'était étranger ni au genre policier ni à celui d'un certain fantastique, même si on l'imagine assez mal pouvoir le confondre avec quelque obsessionnel graphomane comme Jimmy Guieu !
Mes recherches consacrées à un autre éditeur, évoqué par André Lavacourt, les éditions du Gerfaut, n'ont donné aucun résultat, et cela alors même que l'auteur, dans une lettre à Gallimard du 9 juin 1959, affirme que la première version de ce qu'il appelle un reportage intitulé La vérité sur le Maroc a été refusée «avec un ensemble parfait par plusieurs éditeurs», dont Gallimard ne se prive-t-il pas d'ajouter, «sous divers prétextes et, en fait, parce que c'était très difficilement publiable», alors que la seconde version, elle, «après divers avatars, a été acceptée par les éditions du Gerfaut 9 rue Lobineau»; hélas, continue Lavacourt, il n'a alors signé aucun contrat «et la sortie du livre continuait d'être profondément imminente depuis des mois quand cette maison [lui] a fait savoir qu'elle cessait ses activités», car là encore «ce n'était pas son genre». Ce n'est qu'après cette déconvenue que Lavacourt tentera sans doute sa chance auprès de Jean d'Halluin, comme je l'ai dit, qui lui demande, le premier juin 1959, de lui envoyer le manuscrit de La vérité sur le Maroc, mais là encore, rien n'a été publié. Contacté par mes soins, un passionné de recherches éditoriales peu communes a pu confirmer différentes hypothèses : «S'il [Lavacourt bien sûr] est entré en contact avec cet éditeur, alors cela ne peut être effectivement que vers la fin des années 1950, aux débuts de celui-ci. Il semble en effet que Gerfaut ait voulu faire preuve d'une certaine ambition littéraire en proposant des titres hors de la littérature dite populaire alors en plein essor. Notamment via une collection sortie en 1957, rapidement stoppée, nommée Œuvres Saisissantes avec une présentation sobre assez proche de celle des NRF de Gallimard (fond blanc, pas d'illustration, polices en noir et rouge)», et cet amateur éclairé, visiblement passionné par ce sujet, de me donner bien d'autres précisions qui débordent largement le cadre de notre propre recherche sur l'auteur des Français de la décadence, décidément insaisissable, à moins que je ne finisse, un jour qui sait, par tomber sur une malle remplie de manuscrits qui seront sans doute inexploitables tant ils auront été abîmés par le temps, oubliés de tous, comme s'ils n'avaient jamais existé, comme si, décidément, tout avait été fait, sans volonté bien précise au demeurant, pour qu'André Lavacourt disparaisse, non seulement avec son roman publié, mais avec ses autres textes dont nous ne saurons sans doute jamais rien.
Peut-être est-il temps, maintenant, de laisser aller les choses comme elles doivent aller, de confier au choc résolument imprédictible de quelques lignes et trames invisibles, miraculeusement préservées de la bêtise et de la corruption générales, la surprise d'une découverte ou d'un témoignage pas mêmes soupçonnés, réellement inattendus, de laisser les choses aller à vau-l'eau et s'enfoncer un peu plus encore le Français de la décadence qui, selon Léon Bloy, «a des passions séniles qui lui font trouver un ragoût inexprimable à toute tentative de corruption sur les innocents et les impubères», cette «bête féroce», poursuit-il, se repaissant «par prédilection des jeunes cadavres», alors qu'il n'y a pas lieu «d'espérer qu'elle y renonce sur la vaine menace d'un scandale qui ne servirait qu'à exaspérer sa frénésie» (6), peut-être est-il grand temps d'espérer que le roman d'André Lavacourt qui lui aussi a peint ces Français de la décadence, sera correctement réédité, en janvier 2026 m'a-t-on confié, ou encore qu'un court-métrage monté avec les moyens du bord mais la compétence de deux amis particulièrement aguerris et méticuleux, présenté d'ici peu en tant que pilote d'une mélancolique série, ne projette un peu de lumière sur un texte qui jamais n'aurait dû disparaître dans un pays, la France je crois, s'honorant de porter si haut son génie littéraire.
Notes
(1) Bien des mystères voire des incohérences subsistent autour des dates de naissance et de mort d'André Lavacourt, malgré plusieurs recherches d'ordre archivistique, que j'ai pu mener ou qui ont été spontanément réalisées par des lecteurs ayant eu l'amabilité de me communiquer leurs résultats, lecteurs dont je ne sais parfois strictement rien, mais que je remercie chaleureusement; en effet, la quatrième de couverture des Français de la décadence indique que l'auteur a 45 ans au moment où paraît son roman, en 1960 donc, ce qui nous donne, comme date plus ou moins approximative de naissance, 1915. Or, les seules traces d'un Pierre, et même Jean-Pierre et même Jean-Pierre Henri Couturier, font remonter sa naissance à 1920 (selon le SDH de Vincennes qui semble posséder un dossier de résistant à ce nom) ou alors 1921 (mais dans les deux cas le même jour et le même mois, ce qui laisse supposer une erreur, le 27 août), selon le site Geneatet qui nous apprend qu'il serait mort en 2006 à Issy-les-Moulineaux. Dans la lettre qu'Antoine Gallimard m'avait écrite, citée dans une de mes précédentes études, aucune précision sur la date de décès de Lavacourt ne m'avait été donnée. En tout cas, la piste d'une naissance de l'écrivain en 1920 ou 1921 paraît fausse, et il me semble que nous pouvons donc poursuivre nos recherches, puisqu'un de mes lecteurs ayant effectué sur place sa propre efficace enquête a pu m'indiquer ce qui suit : «grâce à l'adresse de son domicile figurant sur cet acte [de décès], j'ai même pu remonter jusqu'à un petit-fils. Hélas ! Ce Jean-Pierre Couturier mort à Issy en 2006 n'est manifestement pas notre homme... Son petit-fils, qui a interrogé à ce sujet sa mère (née en 1960 en France), est formel : ledit Jean-Pierre Henri Couturier n'a pas vécu en Algérie, n'était pas médecin et ne ressemblait absolument pas à la photographie dont nous disposons...». Décidément, c'est à croire qu'un malin génie s'amuse à brouiller les pistes menant directement à cet homme qui fut du reste par nature maniaquement discret.
(2) Ainsi, nous apprenons qu'André Lavacourt était «très jeune» quand il a envoyé «à tout hasard un roman policier au comité de lecture de la N.R.F.» et qu'il «a reçu, en réponse, une lettre très aimable de monsieur Queneau par laquelle il [lui] faisait savoir que [Gallimard ne pouvait l'éditer», puisque nous nous trouvions alors en période de guerre, «mais qu'il l'envoyait à un hebdomadaire de ce temps là qui s'appelait Tout et tout et qui n'a duré que quelques mois». Le roman a donc été publié en neuf feuilletons que nous avons retrouvés et lus, s'étendant des numéros du 28 juin 1941 au 23 août 1941, Raymond Queneau ayant même songé à en faire un film et fait porter le manuscrit de ce texte à un certain Monsieur Raymond Tual. Depuis cette époque en tout cas, Lavacourt, de son propre aveu, n'a jamais cessé d'écrire mais n'a plus rien proposé aux éditeurs avant 1959, avec un reportage intitulé Un regard sur le Maroc et bien sûr Les Français de la décadence. Il y a, dans tout ce qu'il a écrit, «des reportages», un sur le Maroc donc, mais aussi un sur l'Algérie, «deux romans assez classiques, un autre qui est l'essai d'une technique spéciale, un ensemble d'une douzaine de romans [qu'il ne peut] qualifier autrement que de «policiers» bien qu'en fait, ce ne soit pas ça puisque la solution est toujours irrationnelle». C'est après ce passage que Lavacourt glisse une confidence à son éditeur, lui indiquant que l'un de ses amis appelle ce genre de textes de la «science-occulte-fiction», puis il continue en énumérant d'autres productions, comme «des pièces de théâtre, des découpages de cinéma, beaucoup de nouvelles etc...». Qu'est devenue cette grande quantité de textes ? A-t-elle été entièrement détruite ou éparpillée, dort-elle dans quelque malle perdue dans une cave française ou algérienne ? N'est-il donc pas possible de trouver quelque trace d'un ou des manuscrits qui ont été visiblement lus par au moins un éditeur, le plus important d'entre eux, Gallimard qui, selon une coutume qui était à cette époque encore ancrée dans les mœurs, a dû renvoyer à son auteur ce qu'il avait décidé de ne pas publier ?
(3) Passées à la postérité, outre pour la mythologie ayant entouré son fantasque patron, grâce à la publication en 1946 de J’irai cracher sur vos tombes, roman bien connu d’un certain Vernon Sullivan, alias Boris Vian.
(4) Voir Les Éditions du Scorpion (1946 – 1969). De Boris Vian à Maurice Dekobra, par François Darnaudet et Étienne Borgers, le texte peut être acheté en ligne.
(5) Petite exception tout de même, mais fort décevante puisqu'elle ne concerne que la mention de l'année de parution et le titre de notre roman, dans Le Rayon SF d'Henri Delmas et Alain Julian (Milan, 1985), p. 260. Tant de savoir et de recherches de la part de nombreux auteurs capables de vous citer le moindre titre oublié d'un écrivain non pas mineur mais minuscule, paru en 1910 ou 1923 chez un éditeur lui-même insignifiant ou disparu, tant de pages de l'Encyclopédie de la Science-fictionsous la direction de Robert Holdstock, de l'Encyclopédie visuelle de la science-fiction sous la direction de Brian Ash, de telle autre encyclopédie sous la direction de Jean-Pierre Piton et Alain Schlockoff, de tel Dictionnaire utopique de la science-fiction d'Ugo Bellagamba, de biens autres ouvrages sur la question, que je possède ou que je suis allé consulter en salle de lecture, mais en revanche quasiment rien, ou plutôt, disons-le bien franchement : rien du tout sur un roman français, assez récent pourtant puisqu'il date de 1960, figurant un avenir proche, uchronique en somme, lorsqu'il fut écrit dans les années 50, voilà qui représente pour le moins une véritable déception ! Messieurs les érudits, s'il en reste, vous savez ce qu'il vous reste à faire et, en plus, magnifique aubaine, sur un auteur à peu près vierge de tout commentaire ! Profitez-en donc, il n'y en a pas tant que cela, finalement, sur lesquels vous pourrez aiguiser votre sagacité comme autant de petites dents savantes toutes pressées de grignoter de maigres miettes de savoir littéraire !
(6) Léon Bloy, dans un texte intitulé Massacre des innocents faisant partie de ses implacables Belluaires et porchers in Œuvres de Léon Bloy, tome 2 (Mercure de France, édition établie par Joseph Bollery et Jacques Petit, 1964), p. 364.